Les grands mammifères connus sous le nom de rhinocéros captivent l’attention par leur présence imposante et leur aspect singulier. Pourtant, ces animaux sont aujourd’hui parmi les espèces les plus en danger d’extinction, en raison du braconnage massif dont ils font l’objet. Cet article explore les motifs pour lesquels leur corne suscite autant de convoitise, les techniques employées par les chasseurs clandestins pour la dérober, ainsi que les initiatives visant à préserver ces créatures vulnérables.
Les différentes espèces de rhinocéros
Appartenant à la famille des Rhinocerotidae, qui est l’une des plus anciennes dans le règne animal, ces mammifères se déclinent en cinq variétés distinctes : deux en Afrique et trois en Asie.
La plus grande parmi elles, le rhinocéros blanc (Ceratotherium simum), se divise en deux sous-groupes : ceux du Sud et ceux du Nord, ce dernier étant quasiment disparu à l’état sauvage. Contrairement à ce que leur nom laisse entendre, leur teinte va du jaune-gris au brun, sans véritablement être blanc. Leur nom pourrait venir de l’afrikaans « wyd », signifiant « large », en référence à leur large bouche adaptée à leur alimentation de pâturage. Ces rhinocéros évoluent principalement dans le sud de l’Afrique, notamment en Afrique du Sud, au Zimbabwe, en Namibie et au Kenya, vivant en milieu de savane proche des points d’eau. Ils se recouvrent de boue pour réguler leur température et se protéger contre les parasites.
Le rhinocéros noir (Diceros bicornis) est plus petit et se différencie de son cousin blanc par ses deux cornes et sa bouche en forme de bec, conçue pour attraper feuilles et branches. Plutôt solitaire et territorial, en particulier chez les mâles, il vit dans des habitats variés comme la brousse dense, la savane ou les zones montagneuses boisées, répartis en quatre sous-espèces à travers l’est et le sud du continent africain.
Le rhinocéros de Java (Rhinoceros sondaicus) se distingue par sa rareté, logeant principalement dans le parc national d’Ujung Kulon en Indonésie. Sa silhouette présente une unique corne petite et une peau plissée ressemblant à une cuirasse. Très farouche, il est difficile à observer en milieu naturel.
Le rhinocéros de Sumatra (Dicerorhinus sumatrensis) possède deux cornes et un pelage épais qui lui permet de faire face aux températures plus froides de ses habitats en haute altitude. Il fréquente des forêts tropicales humides d’Indonésie et de Malaisie, où sa conservation pose des défis en raison de la fragmentation de ses territoires difficile d’accès.
Enfin, le rhinocéros indien (Rhinoceros unicornis) est le plus volumineux de ses homologues asiatiques, avec une peau segmentée en forme d’armure et une seule grande corne. Résidant préférentiellement dans des zones humides et prairies alluviales en Inde et au Népal, il se nourrit de feuilles, de branches, de fruits et même de cultures agricoles.
La fonction de la corne
Les rhinocéros sont généralement solitaires, sauf lorsqu’une mère est en compagnie de ses petits. Leur habitat s’étend depuis les savanes africaines jusqu’aux forêts tropicales d’Asie.
La corne, souvent perçue comme un outil de défense, sert principalement à fouiller le sol pour dénicher sels, minéraux ou autres nutriments, ou à déraciner des plantes comestibles. Elle joue aussi un rôle lors des combats entre mâles, qui se disputent leur dominance territoriale ou leur accès aux femelles.
Ces animaux se caractérisent aussi par leur peau épaisse pouvant atteindre 5 cm d’épaisseur, ainsi que par leur odorat et leur ouïe particulièrement développés, en plus de leur fameuse corne faite de kératine.
Contrairement à la matière utilisée par les cervidés, cette structure n’est pas une vraie corne osseuse, mais une excroissance compactée de fibres de kératine. Chez ceux qui portent deux cornes, celle située à l’avant est la plus imposante.
Les mythes et superstitions alimentant la demande
Dans plusieurs cultures asiatiques, notamment en Chine et au Vietnam, la corne de rhinocéros est très valorisée, principalement en médecine traditionnelle, sans preuves scientifiques de son efficacité. Comment un ensemble structurel semblable à des ongles pourrait-il soigner des maladies ?
On lui prête des vertus prétendument curatives contre la fièvre, l’épilepsie, ou même certains cancers. Elle est aussi vue comme un symbole de statut social ou de richesse, façonnée en objets d’art, ou utilisée à des fins cérémonielles comme la poignée de khanjar, une dague orientale.
La menace liée au braconnage
Le commerce illicite de cornes de rhinocéros est une cause majeure de leur déclin alarmant. Le braconnage intensif réduit drastiquement leur population, mettant en péril la survie de ces animaux et fragilisant l’équilibre écologique dans leurs habitats, qui sont des zones essentielles pour la biodiversité.
En Afrique du Sud, la nation détient la plus importante population mondiale de rhinocéros, mais ses efforts de protection sont souvent insuffisants face à la menace croissante. La situation est tout aussi critique dans d’autres régions africaines et asiatiques, où la population de ces animaux, déjà faible, est encore plus vulnérable en raison de leur répartition dispersée.
Les statistiques sont donc préoccupantes : entre 2007 et 2014, le nombre de rhinocéros tués chaque année en Afrique du Sud a explosé, passant de 13 à plus de 1200. Même si ces chiffres ont connu une petite baisse, le braconnage reste une menace constante. En Asie, les populations de rhinocéros de Java et de Sumatra, en très faible nombre, sont d’autant plus exposées à la disparition suite à chaque acte de braconnage.
Les braconniers, généralement organisés et dotés de ressources importantes, usent de méthodes sophistiquées pour capturer ces animaux, notamment en utilisant des hélicoptères pour repérer et accéder à leur cible. Plutôt que de les endormir, ils préfèrent les tuer sur place, laissant derrière eux des carcasses.
Les actions pour sauver ces espèces
Pour lutter contre cette menace, diverses stratégies de conservation sont déployées, telles que la formation et l’embauche de gardes armés dans les parcs et réserves naturelles, ainsi que l’exploitation de technologies modernes comme les drones pour surveiller les populations. Des partenariats internationaux travaillent avec les gouvernements locaux pour renforcer les lois contre le braconnage et appliquer des sanctions plus sévères. Une sensibilisation accrue du public est aussi en cours pour limiter la demande en informant sur l’absence de preuves scientifiques concernant l’efficacité médicinale de la corne.
Dans certains parcs africains, la pratique consiste à faire sectionner la corne des rhinocéros. Puisque celle-ci est faite de kératine, une substance semblable à nos ongles, son retrait n’est pas douloureux, mais doit être répété tous les deux ans. Cependant, cette opération n’est pas sans conséquences : les rhinocéros dépourvus de corne ont tendance à être moins sociaux, avec une réduction considérable de leur territoire, ce qui pourrait nuire à leur reproduction. Des mâles ont vu leur espace diminuer de près de 80 % après leur opération, tandis que les femelles ont perdu en moyenne la moitié de leur territoire. La corne étant un élément clé dans les combats pour la territorialité, son absence peut aussi diminuer leur capacité à défendre leur groupe ou leur territoire, impactant ainsi leur reproduction à long terme. Les recherches continueront à évaluer toutes ces conséquences.