Le goujon, animal naturellement sociable, tend à grouper en colonies pouvant atteindre une centaine d’individus à vivoter dans les fonds aquatiques. La présence de cette petite espèce de poisson indique souvent une eau claire, fraîche, riche en acétats, et peu polluée. Très sensible à la dégradation de son environnement, il sert de véritable indicateur biologique pour évaluer la qualité de l’eau dans son habitat.
De quelle famille fait partie le goujon ?
Le goujon commun (Gobio gobio) appartient à la famille des cyprinidés, au sein de l’ordre des cypriniformes, et se classe parmi les otophysaires. Ces derniers se distinguent par la présence d’un appareil de Weber, une structure reliant la vessie natatoire à l’oreille interne, qui leur permet de mieux percevoir les sons et de garder leur équilibre en ajustant la vessie selon les besoins. La famille des cyprinidés, la plus vaste des poissons d’eau douce, possède notamment des dents pharyngiennes situées dans leur arrière-bointe, sur le pharynx. Parmi les appellations françaises du goujon figurent aussi des noms comme gofi, gouvin, gouvion, gressling, grougnon, grundling, kress, touret, tragan ou troga.
Comment reconnaître le goujon ?
Ce poisson au corps effilé et fusiforme présente une silhouette allongée, une tête robuste, un museau épais, un ventre aplati et de grands yeux. Sa bouche, capable de s’étirer vers l’avant, est équipée de barbillons tactiles qui servent à sonder le fond. La nageoire dorsale, haute et courte, se place légèrement en avant des nageoires pelviennes, tandis que la caudale affiche une forme fortement échancrée. La peau de l’animal est couverte d’écailles, à l’exception de la gorge ventrale. Sa coloration lui permet de se fondre dans le décor, avec des teintes allant du vert noirâtre au brun bleuâtre sur le dos, au brun-jaunâtre sur les côtés, et au blanc sur le ventre. Les nageoires dorsale et caudale présentent de petits points noirs, ainsi qu’une ligne latérale de taches sombres. La taille moyenne du goujon est d’environ 10 cm, pour un poids à peu près 20 g. Le record français de la pêche de cet espèce est de 17 cm pour 220 g.
Où se trouve le goujon dans son aire de répartition ?
Le goujon bénéficie d’une aire de distribution couvrant une grande partie de l’Europe jusqu’à l’Oural, avec aussi une présence en Asie, notamment en Corée. Bien qu’il soit absent naturellement des régions septentrionales comme la Scandinavie ou méridionales comme la péninsule Ibérique ou la Grèce, il a été introduit dans certaines zones de Scandinavie, en Grande-Bretagne, en Espagne, au Maroc et en Corse. En France, c’est une espèce indigène que l’on retrouve dans la majorité des cours d’eau, témoignant de son adaptation à l’environnement local.
Quel habitat privilégie le goujon ?
Le goujon est un adepte des milieux courants, préférant évoluer dans des zones où le débit est important. Il fréquente principalement les rivières et ruisseaux à eau vive, limpides, bien oxygénées. En tant que poisson benthique, il recherche des substrats variés comme les galets, le sable ou le gravier, qu’il fouille activement à la recherche de nourriture. Il peut aussi résider dans des lacs ou canaux à fonds vaseux, restant près des berges et à faible profondeur. Bien qu’il évite généralement les zones situées à plus de 650 mètres d’altitude, il tolère des températures comprises entre froid et 28 °C. Très sensible aux déséquilibres de son environnement, sa présence est un bon indicateur de la santé de l’écosystème aquatique.
Que mange le goujon ?
Ce poisson fouisseur se nourrit en fouillant le substrat avec sa bouche inférieure et ses barbillons tactiles. Son alimentation est omnivore : il consomme aussi bien des végétaux que des organismes animaux, notamment les débris végétaux, algues filamenteuses, mollusques, crustacés, vers et autres invertébrés aquatiques. Il a une prédilection pour les larves d’insectes et les œufs de poissons. Chez les jeunes, l’alimentation est principalement constituée d’espèces microscopiques, avant qu’il ne développe un régime plus varié en âge avancé.
Comment se reproduit le goujon ?
Ce poisson vit en colonies souvent composées de plusieurs dizaines à une centaine d’individus. La période de frai se concentre généralement en mai et juin, lorsque la température de l’eau atteint au moins 14 °C. Les individus migrent alors vers des zones de reproduction, où des femelles, en plus grand nombre que les mâles, déposé leurs œufs. Les goujons communiquent entre eux par des vocalisations, surtout durant la saison de reproduction, plus nombreuses en journée. Pendant la parade nuptiale, le mâle développe de petites excroissances blanchâtres, appelées tubercules nuptiaux ou boutons de noces, sur la tête et l’avant du corps.
Comment naissent et meurent les goujons ?
La ponte s’effectue en plusieurs fois, avec des libérations d’œufs espacées de quelques jours. La femelle dépose alors entre 1 000 et 3 000 œufs d’environ 1,5 mm accroché en grappes sur des supports comme des pierres ou des végétaux dans des eaux courantes peu profondes. Après 2 à 3 semaines d’incubation, les larves éclosent, puis mènent une vie benthique, proches de leur site de frai. La maturité sexuelle intervient autour de 2 ou 3 ans. En tant que proie de nombreux carnassiers d’eau douce — brochet, sandre, perche ou truite —, le goujon ne dépasse généralement pas les 4 à 5 années d’espérance de vie, bien que certains specimens puissent vivre jusqu’à 8 ans. Sa longévité est influencée par la température de l’eau, étant plus courte dans les régions plus chaudes du sud.
Crédit photo : Bernard Dupont