Le Dodo, cet oiseau emblématique aujourd’hui disparu, fascine autant par ses origines que par sa fin tragique, évoquant à la fois l’histoire des grandes explorations et les enjeux de la biologie évolutive.
La première rencontre des Européens avec le Dodo
En mai 1598, une flotte hollandaise composée de huit navires, dirigée par le célèbre amiral Wybrand van Warwyck, se lança dans une expédition vers les Indes orientales. Sur le chemin, face à une tempête, elle dut faire escale dans une baie située au sud de l’île Maurice. Bien que cette région ait déjà été sous influence portugaise depuis le début du XVIe siècle, l’île elle-même restait peu explorée. Lors de cette halte, van Warwyck profita de l’occasion pour examiner l’île, qui recelait des ressources abondantes : eau, nourriture, bois précieux. Il établit alors un comptoir stratégique qui allait devenir une étape clé pour la Compagnie néerlandaise des Indes.
C’est lors de cette exploration qu’il fit la découverte du Dodo. Auparavant, les Portugais n’étaient pas au courant de son existence. À mesure que le comptoir se développait et que de nouveaux visiteurs arrivaient, d’autres témoins du Dodo furent recensés. Des dessins du volatile figurent dans les journaux de bord des navires ayant fait escale à l’île Maurice.
Quelles étaient les caractéristiques du Dodo ?
Ce royaume des oiseaux disparaus appartenait à la famille des colombidés, proches par leur lignée des pigeons originaires d’Asie. Exclusivement endémique à l’île Maurice, cette espèce était aussi appelée Dronte. Elle possédait des liens de parenté avec le Dronte de Rodrigues, un oiseau de taille comparable à une autruche, également aujourd’hui disparu, qui doit son nom à l’île où il vivait.
De nos jours, la seule trace tangible du Dodo réside dans des squelettes conservés dans des musées, comme celui d’Histoire naturelle de Paris, où un squelette complet assemblé à partir de restes de plusieurs individus est exposé. Un œuf de Dodo aurait également été retrouvé en Afrique du Sud, dans le musée d’East London.
Les scientifiques, confrontés à la disparition de l’oiseau, doivent se baser sur des hypothèses. Pendant longtemps, sa représentation comme un animal corpulent s’est répandue, mais il s’avère maintenant que ces images résultaient souvent de Dodos élevés en captivité, souvent suralimentés, et ne reflétaient pas leur apparence sauvage. Il ne mesurait pas plus d’un mètre, et ses ailes étaient nettement réduites par rapport à son corps.
Concernant son alimentation, la majorité des spécialistes pensent que le Dodo se nourrissait principalement de graines et de fruits disponibles sur l’île.
Les raisons de l’extinction du Dodo
La disparition du Dodo illustre parfaitement l’impact négatif de la confrontation de l’homme avec un environnement peu connu. À l’époque, la priorité était la conquête et l’exploitation des terres inconnues, sans une conscience écologique à son origine. La stabilité de son habitat insulaire, convergeant à l’origine vers une vie sans prédateurs, lui avait permis de cesser de voler, une perte progressive impactant ses ailes qui devinrent très petites.
L’arrivée des explorateurs a bouleversé cet équilibre fragile. La chasse, facilitée par la lenteur de l’oiseau, a contribué à sa diminution. Sa chair, bien que moins savoureuse que celle du pigeon, était appréciée, et le nombre de Dodos sur l’île était considérable.
Ce qui a surtout accéléré son extinction fut l’introduction d’espèces exotiques : porcs, chiens, chats, rats et macaques crabiers, qui s’attaquaient aux nids et détruisaient ses habitats forestiers où il se reproduisait. En peu de décennies, à la fin du XVIIe siècle, le Dodo s’est éteint, moins d’un siècle après sa découverte par l’homme.
Faits surprenants autour du Dodo
Une ironie de l’histoire réside dans le fait qu’au début du XIXe siècle, beaucoup de chercheurs doutaient de l’existence même du Dodo. Ce n’est qu’après la mise au jour de ses ossements que les investigations ont véritablement commencé. Les anglophones ont même forgé deux expressions en l’honneur de cet oiseau, évoquant sa extinction : « Dead as a Dodo », signifiant « mort comme un Dodo », et « To go the way of the Dodo », exprimant que quelque chose est voué à disparaître.
Le Dodo apparaît également dans la littérature, par exemple dans Les aventures d’Alice au pays des merveilles, publié en 1865, où il incarne une créature mythique. Ce personnage aurait été une référence à l’auteur Lewis Carroll, dont le nom véritable était Dodgson. Dans l’adaptation Disney, le Dodo est incarné sous la forme d’un amiral dépeint en chanson, donnant vie à sa figure légendaire.
Malgré sa disparition, cet oiseau reste l’un des plus célèbres, symbolisant à la fois l’éphémérité de la vie et les conséquences de l’exploitation humaine. Espérons que cette lecture de son histoire vous aura apporté un éclairage nouveau sur cet emblème de la biodiversité.