Cachalot : le grand mammifère marin à dents

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Après avoir été la cible d’une chasse intensive durant plus de deux siècles, le cachalot a vu sa population fortement diminuer. Cette période de traque, qui incarnait l’un des piliers de l’industrie baleinière, est évoquée dans le célèbre roman Moby Dick publié en 1851, de Herman Melville. En tant que plus imposant des prédateurs dentés de la planète, cette créature présente une vulnérabilité face à l’histoire humaine tout en incarnant une force de la nature formidable.

Présentation du cachalot

Le cachalot, scientifiquement appelé Physeter macrocephalus, appartient à la famille des cétacés et à celui des odontocètes, ceux-là même qui se distinguent par leur présence de dents. Contrairement aux mysticètes ou baleines à fanons, il possède des dents visibles. La famille des physétéridés comprend également deux autres espèces peu connues : le cachalot pygmée et le cachalot nain. La femelle mesure généralement entre 12 et 14 mètres, avec un poids pouvant atteindre 25 tonnes, tandis que le mâle est nettement plus grand, atteignant jusqu’à 18 mètres de long pour un poids avoisinant 50 tonnes. Ces proportions font du cachalot la plus grande des baleines à dents.

Reconnaître un cachalot

Ce mammifère marin présente une silhouette très robuste, avec une tête massive à profil principalement rectangulaire et un dos plutôt droit. Sa nageoire caudale, souvent triangulaire, peut atteindre une envergure de 4 mètres, lui conférant une puissance essentielle à sa propulsion. La queue, articulée, se déploie pour assurer à la fois la poussée et la direction de ses déplacements. Ses petites nageoires pectorales épaisses et courtes lui permettent de garder son équilibre et de freiner. En l’absence d’une nageoire dorsale classique, il est marqué par la présence de bosses sur la partie postérieure de son dos. Les dents, de 17 à 25 paires, sont situées dans sa mâchoire inférieure. La pigmentation de son corps est principalement gris foncé, souvent marquée par des cicatrices blanches, notamment autour du melon, vestiges de combats ou d’attaques de calamars géants, sa nourriture favorite. Sa peau, lisse et dépourvue de poils, optimise sa glisse dans l’eau, tandis qu’une couche épaisse de graisse limite les pertes thermiques. Au centre de son cerveau, le plus volumineux chez tous les mammifères, réside le spermaceti, une substance cireuse qui permet de réguler sa flottabilité selon la température et la profondeur.

Capacité à plonger longuement sous l’eau

Le cachalot est un plongeur exceptionnel, capable d’atteindre des profondeurs records de 3000 mètres et de rester immergé plus d’une heure et demie. Son corps a développé des adaptations remarquables pour faire face à la pression extrême et aux longues périodes sans respirer. Parmi ces adaptations, deux éléments majeurs expliquent sa résistance :

  • Une cage thoracique souple qui se comprime lors des immersions, permettant le collapse des poumons, ce qui limite la quantité d’azote absorbée et ralentit le métabolisme, en préservant ses organes vitaux ;
  • Une concentration très élevée de myoglobine dans le sang, cette protéine stocke l’oxygène nécessaire à ses muscles. La densité accrue des globules rouges facilite également le transport de l’oxygène circulant dans son organisme.

Alimentation du cachalot

Ce mammifère se déplace principalement dans les eaux froides et tempérées des océans du monde entier, en particulier dans la zone pélagique. Sa migration saisonnière lui permet de se nourrir et de se reproduire. Son régime alimentaire est principalement composé de calamars géants qu’il chasse à de grandes profondeurs, faisant de lui le principal prédateur de ces céphalopodes. Ses autres proies incluent diverses pieuvres, poulpes, poissons et crustacés. Des études indiquent également qu’il peut s’attaquer à des grands requins ou des phoques. La femelle consomme environ 500 kilos de nourriture par jour, tandis que le mâle peut ingérer jusqu’à 1,5 tonne.

Une vie sociale complexe

Le cachalot vit en groupes comprenant généralement une dizaine à une trentaine d’individus, qui échangent par des vocalisations caractéristiques appelées codes. Ces sons, utilisés pour communiquer et socialiser, sont complétés par des comportements de frottement mutuel. Les jeunes mâles tendent à former des petits groupes de célibataires, tandis que les mâles plus âgés mènent une vie principalement solitaire, ne rejoignant leurs congénères que pour la reproduction. Les femelles avec leurs petits résident souvent en groupes matriarcaux, dont elles se montrent rarement séparées. En cas de menace, ces groupes adoptent une formation en marguerite», visant à protéger les jeunes et à intimider les prédateurs via des battements de la queue. Bien que peu de prédateurs naturels représentent une menace pour un cachalot adulte, les plus jeunes ou faibles peuvent être la cible des orques ou des globicéphales.

Les jeunes et leur apprentissage

Chez cette espèce, les mâles ne forment pas de harems, mais s’accouplent librement. Après une gestation de 14 à 16 mois, une femelle met au monde un seul petit, mesurant environ 4 mètres et pesant près d’une tonne. Pendant ses premiers mois, le baleineau se nourrit exclusivement du lait maternel, très riche en matières grasses (environ 36 %), qui adopte une consistance ressemblant à du fromage blanc pour éviter de se dissoudre dans l’eau. Contrairement à d’autres mammifères, il ne tète pas directement, mais profite du lait expulsé par la mère. Le sevrage commence vers 18 mois à 3 ans, mais les jeunes peuvent rester plusieurs années auprès de leur mère, parfois plus d’une décennie. Les femelles deviennent fertiles vers 9 ans, alors que les mâles atteignent la maturité sexuelle vers 18 ans.

Historique de la chasse au cachalot

Historiquement, cette grande créature a été traquée pour extraire son spermaceti, une substance blanche très prisée dans diverses industries : lubrifiants, lampes, bougies, produits cosmétiques. L’ambre gris, un extrait produit par le animal lors de la digestion, a également été une ressource précieuse, notamment pour la parfumerie, en raison de ses propriétés fixantes et de son parfum puissant. Originaire des sécrétions biliaires, cette masse ressemblant à une pierre grise était autrefois considérée comme une “merde de baleine”. Aujourd’hui, l’interdiction de chasser ces cétacés a déplacé la recherche de ces substances vers des plages où le “vomi” échoue, notamment dans l’Océan Indien, où cette “cire flottante” est surnommée l’or flottant.

État de conservation et menaces

Victime de la chasse à grande échelle depuis le XVIIIe siècle, le cachalot a failli disparaître. La pêche intensive pour ses précieuses substances a réduit ses populations, notamment à la fin du XIXe siècle, avant de connaître un renouveau après la Seconde Guerre mondiale. La mise en place d’un moratoire en 1982 par la Commission baleinière internationale a permis à ses effectifs de se reconstituer lentement. Aujourd’hui classé comme vulnérable par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), cet animal peut atteindre jusqu’à 70 ans d’âge, mais reste sensible à certains dangers.

Crédit photo : Gabriel Barathieu