Qu’est-ce que le guano et comment est-il utilisé par l’homme ?

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Le terme « guano » désigne l’accumulation de déchets organiques d’origine animale, principalement provenant d’oiseaux marins, de chauves-souris ou parfois de phoques. Cette ressource naturelle est particulièrement riche en éléments nutritifs essentiels à la croissance des plantes, comme l’azote, le phosphore et le potassium. Depuis des siècles, il est apprécié comme un fertilisant efficace qui favorise la fertilité des sols, utilisé dans différentes régions du monde. Dans cet article, nous allons explorer l’histoire du guano, ainsi que sa place aujourd’hui dans l’agriculture moderne.

Composition et environnement de formation

Le guano se forme uniquement dans des zones climatiques spécifiques où l’aridité limite la décomposition rapide des déjections animales. Ces lieux privilégiés se situent principalement sur des îles et côtes bordant l’océan Pacifique et l’océan Atlantique. Historiquement, le Pérou, le Chili et la Namibie ont été les principaux producteurs de cette précieuse ressource. Pendant plusieurs décennies, l’Amérique du Sud détenait une position dominante sur cette industrie, exportant des millions de tonnes de guano, valant à l’époque des milliards de dollars actuels.

Ce fertilisant naturel est essentiellement originaire des excréments de chauves-souris et d’oiseaux marins. Sa composition repose en grande partie sur des composés organiques contenant du nitrate, du phosphate (ayant rapport avec le phosphore), et du potassium, avec de faibles traces d’autres minéraux utiles pour la croissance végétale. Même si tous ces fertilisants traditionnels, qu’il s’agisse de fumier ou de lisier, jouent un rôle dans l’enrichissement des sols, le guano a une histoire et une importance particulières.

Une découverte majeure pour l’agriculture

Ce n’est qu’en 1848 que la compréhension scientifique du rôle de l’azote dans la croissance des végétaux a été clarifiée. Le chimiste allemand Justus Von Liebig a mis en évidence que, bien que l’azote soit abondant dans l’atmosphère, il n’est assimilable par les plantes qu’après transformation en forme minérale dans le sol. La minéralisation des déchets organiques et des résidus végétaux était donc essentielle pour fournir cette substance vitale, ce qui a permis par la suite de repenser profondément la fertilisation agricole.

Cela a conduit, plusieurs décennies plus tard, à une innovation technologique majeure. La synthèse de l’ammoniac, permettant la production d’engrais azotés de synthèse, a révolutionné l’agriculture du XXe siècle. La compréhension scientifique de l’azote a ainsi été à la base d’un progrès considérable qui a permis d’accroître significativement les rendements agricoles mondiaux.

Une utilisation ancestrale et mondiale

Depuis l’aube de l’agriculture, l’humain a vite exploité la richesse des déjections animales. La simple expérience a montré que l’engrais naturel augmentait la croissance et la verdure de l’herbe. Dans l’histoire, l’utilisation du guano est attestée chez les Incas en Amérique du Sud, où il était déjà exploité pour améliorer la productivité agricole.

Au XIXe siècle, la popularité du guano explose en tant que produit d’exportation. La forte valeur commerciale génère une véritable ruée vers cette ressource, provoquant une course aux colonies et aux territoires riches en gisement. La compétition entre nations européennes et américaines aboutit à des tensions territoriales, avec par exemple l’annexion par les États-Unis de près de deux cents îles contenant ce matériau précieux, et à des actions diplomatiques comme l’annexion par l’Espagne de plusieurs îles péruviennes pour faire plier le Pérou.

Ce conflit d’intérêts s’étend sur tout le XXe siècle, jusqu’à la mise au point d’une nouvelle méthode chimique qui va faire perdre au guano une partie de sa valeur économique. Ce procédé, en permettant de fabriquer de l’ammoniac synthétique à partir de l’azote atmosphérique, a radicalement changé le marché.

Le guano n’était pas seulement un fertilisant ; il était également utilisé dans la fabrication de colorants et surtout d’explosifs pour l’industrie minière et militaire, devenant un matériau stratégique. Son image était aussi prestigieuse que celle du café ou du cacao.

Mais qu’est-ce qui a provoqué son déclin ?

Après des années de recherche, le chimiste Fritz Haber a conçu un procédé combinant l’azote de l’air avec l’hydrogène du gaz naturel pour synthétiser de l’ammoniac, permettant ainsi de produire de manière industrielle des engrais azotés de synthèse à grande échelle. Ce procédé, bien que gourmand en énergie, est aujourd’hui responsable d’un pourcentage important des émissions de gaz à effet de serre mondiales.

Ce développement a permis à de nombreux pays de réduire leur dépendance aux importations de guano en produisantlocalement leur engrais, ce qui a fomenté une explosion des rendements agricoles, notamment en Europe au XXe siècle. Toutefois, cette dépendance à l’industrie du gaz naturel soulève aussi des enjeux environnementaux, puisqu’une partie de cette consommation mondiale provient de la combustion du charbon, encore très présente.

Le renouveau possible grâce au guano ?

Face aux inquiétudes liées à l’épuisement des ressources fossiles, le recours au guano comme solution alternative connaît un regain d’intérêt, notamment dans le cadre de l’agriculture biologique et durable. Aujourd’hui, cette ressource naturelle est appréciée pour ses qualités nutritives, mais aussi pour ses bénéfices en termes de respect de l’environnement. Son utilisation permet non seulement d’éviter les impacts néfastes des engrais synthétiques, mais aussi d’améliorer la structure du sol, sa capacité d’absorption d’eau et la vitalité de la microfaune présente dans la terre. Ces caractéristiques favorisent une meilleure santé globale des cultures.

Avec une conscience écologique renforcée, la gestion durable du guano s’inscrit dans une volonté de préserver les habitats naturels, notamment ceux des colonies d’oiseaux marins et de chauves-souris. La pratique moderne favorise une exploitation responsable et respectueuse de l’environnement, prolongeant ainsi la valeur de cette ressource précieuse pour l’avenir de l’agriculture.