Certains insects suscitent plus d’effroi que d’autres, mais quelques-uns disposent d’un aspect plus sympathique qui facilite leur acceptation. Par exemple, les coccinelles, les bourdons poilus, les chenilles et les papillons sont fréquemment perçus comme moins inquiétants, surtout parce qu’ils sont vus comme bénéfiques pour le jardin ou parce que leur apparence n’est pas aussi repoussante que celle d’araignées ou de vers de terre. Malgré cela, la crainte envers les insectes varie selon les individus : certains évitent simplement de les toucher mais tolèrent leur présence à proximité, tandis que d’autres réagissent avec une peur intense dès qu’ils en aperçoivent. Cette phobie extrême est désignée sous le terme d’entomophobie. Mais quelle en est l’origine et existe-t-il des moyens de la dépasser ?
qu’est-ce que l’entomophobie ?
Le mot entomophobie est construit à partir de deux racines grecques : éntoma signifiant “insecte” et phobos représentant “peur” ou “effroi”. On retrouve cette même racine dans des termes comme claustrophobie, qui désigne la peur des espaces confinés. Par définition, une phobie correspond à une réaction de peur irrationnelle, dirigée vers un objet, un être ou une situation, même si ceux-ci ne présentent en réalité aucun danger. La peur est une émotion instinctive qui, chez l’humain, fait partie de la part animale de l’être, et sert à préserver sa sécurité. Elle résulte d’une activité de l’amygdale, cette zone du cerveau située dans le lobe temporal. Généralement, lorsqu’un danger est perçu, cette émotion se manifeste physiologiquement, provoquant une réponse au stress qui incite à fuir ou à se préparer à l’affronter.
Une étude publiée en décembre 2010 a particulièrement attiré l’attention des chercheurs : elle portait sur une femme américaine de quarante ans ayant subi une destruction de son amygdale à cause d’une maladie rare. Désormais incapable de ressentir la peur, elle ne pouvait plus non plus reconnaître cette émotion chez autrui, notamment sur le visage des autres. Cette découverte a permis d’ouvrir de nouvelles pistes pour traiter des troubles liés au stress post-traumatique.
Comment peut-on développer une entomophobie ?
Il est estimé qu’environ 6 % de la population manifeste une crainte excessive des insectes. Cette phobie peut apparaître aussi bien durant l’enfance que chez l’adulte. Si ses causes exactes restent souvent difficiles à définir, il semble que les personnes sensibles ou ayant vécu une expérience particulièrement négative ou traumatisante soient plus enclines à la développer. Les individus souffrant de dépression ou ayant subi un traumatisme cérébral seraient également plus vulnérables à ce type de peur, notamment parce que de telles lésions peuvent entraîner des troubles anxieux accentuant la réaction face aux insectes.
Il est aussi fréquent que la peur se transmette au sein d’une famille. Si un membre montre une réaction excessive face à certains insectes, il devient plus probable que d’autres membres, comme des enfants, suivent le même schéma, notamment si ils ont été témoins de ces réactions répétées. Des études génétiques indiquent également un lien potentiel entre certains gènes et la propension à développer des phobies.
Mais la cause la plus courante semble être liée à la crainte de la contamination. La présence d’insectes est souvent associée à un manque d’hygiène, en particulier pour des nuisibles comme les cafards ou les mouches, qui sont effectivement porteurs de maladies. Leur apparence peu attractive, accentuée par l’idée de contamination, nourrit l’anxiété ; certaines personnes redoutent une piqûre pouvant transmettre une infection ou craignent une infestation à l’intérieur de leur corps.
Les signes de l’entomophobie
Une phobie se manifeste par une peur intense face à une situation ou un objet particulier. Dans le cas de l’entomophobie, voir un insecte peut déclencher une réaction de panique quasi immédiate, pouvant conduire à des comportements incontrôlés et dangereux. La crainte concerne souvent la possibilité que ces petits animaux s’introduisent dans les vêtements ou envahissent l’environnement immédiat, provoquant ainsi une réaction de terreur même en dehors d’un contact direct. Pour certains, cette peur devient si envahissante qu’elle limite fortement leur vie quotidienne, voire les contraind à rester chez eux pour éviter tout contact avec des insectes.
Les symptômes typiques sont divers :
- Transpiration excessive ;
- Vertiges et malaise ;
- Douleurs abdominales, migraines, tremblements, nausée, sensation d’oppression dans la poitrine, bouche sèche ;
- Cauchemars et crises de panique ;
- Phobies spécifiques comme : la peur des araignées (arachnophobie), des piqûres d’insectes (acarophobie), des abeilles ou guêpes (apiphobie), des papillons (lépidophobie), ou des fourmis (mirmécophobie).
La présence régulière d’insectes dans la vie quotidienne, notamment dans les foyers, en ville ou dans la nature, peut aggraver cette phobie. Certaines personnes, face à ces envahisseurs, finissent par éviter toute sortie ou interaction avec leur environnement, ce qui peut constituer un handicap sérieux.
Il existe aussi une forme plus spécifique, le syndrome d’Ekbom, qui peut aller au-delà de l’entomophobie classique : il s’agit d’un délire hallucinoire de parasitose, convaincant l’individu qu’il est infesté par des insectes ou des parasites, souvent chez des femmes d’un âge avancé.
Comment soulager l’entomophobie ?
Il est tout à fait possible de réduire ou de supprimer la peur des insectes grâce à différentes méthodes thérapeutiques efficaces.
La thérapie d’exposition par réalité virtuelle offre de très bons résultats. Elle peut être pratiquée dès l’âge de 4 ans, chez les adolescents, chez les adultes et chez les seniors. Son principe consiste à confronté progressivement le patient à l’objet de sa peur, dans un environnement contrôlé et sécurisé. La simulation par réalité virtuelle permet d’insérer des stimuli sensoriels variés tout en surveillant leur intensité, ce qui facilite l’adaptation du traitement. Ces séances peuvent souvent se faire à domicile, avec un suivi à distance. Bien que coûteuse, cette technique a l’avantage de rendre le patient plus actif dans sa guérison. En général, une dizaine de séances de trente minutes suffisent pour constater des progrès, avec une identification précise des causes et des symptômes. Des exercices de relaxation sont intégrés pour aider à gérer l’anxiété et le stress liés à la peur, et divers scénarios comportant des insectes sont élaborés, adaptés à chaque individu.
La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) consiste à analyser et à modifier la perception que le patient a des insectes. En évaluant ses pensées et ses réactions face à ces animaux, la thérapie vise à changer durablement ses comportements et à réduire sa peur. Elle peut être combinée avec la réalité virtuelle pour plus d’efficacité.
Enfin, la psychothérapie classique reste une option précieuse, notamment si le patient présente des symptômes importants ou si d’autres techniques n’ont pas suffi. La prise de médicaments peut alors être envisagée comme soutien pour limiter la gravité des réactions. Ceux-ci peuvent inclure :
- Des bêta-bloquants pour contrôler les effets de l’adrénaline, comme l’hypertension ou la tachycardie ;
- Des antidépresseurs pour réduire la sensibilité à la peur ;
- Des médicaments anti-anxiété, administrés sur une courte période.