Comprendre l’expression « être laid comme un pou » et sa signification

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Le proverbe populaire “être laid comme un pou” évoque une idée évidente, mais ceux qui s’y intéressent pour la première fois se demandent souvent d’où cette expression tire ses origines. En réalité, ce n’est pas tant l’aspect physique de cet acarien qui a inspiré cette comparaison, mais plutôt un autre trait qui lui est associé. Au-delà de sa petite taille, c’est la nuisance qu’il provoque qui soulève le plus d’irritation, principalement ses démangeaisons incessantes.

Quelle est la véritable signification de “être laid comme un pou” ?

Cette expression sert à décrire une personne dont l’apparence est jugée particulièrement peu attrayante ou repoussante. Elle évoque un faciès peu flatteur, une beauté médiocre qui ne plaît pas visuellement. D’autres expressions anciennes partagent cette idée, comme “laid comme le péché” ou “laid comme les sept péchés capitaux”. Voici quelques exemples d’utilisation dans différents contextes :

“Quand tu seras grand, disait la fille de la cuisinière, tu seras aussi laid qu’un pou…” (Elsa Triolet, Le premier accroc coûte deux cents francs, 1944) ;

“Ma mère me répétait souvent : Tu es aussi laide qu’un pou. Tu as des yeux comme des trous de mite. Tu as des jambes trop arquées, de grands pieds, mais heureusement, tu as aussi de jolies oreilles.” (Marie Cardinal, Les mots pour le dire, 1975) ;

“Je racontais à L.F. que je croisais chaque jour à la Sorbonne : Explique-moi ce mystère. Tu n’es plus tout jeune. Tu es laid comme un pou, ventru, bossu, en haillons. Tu n’as pas un sou et pourtant, je t’aperçois souvent entouré de jeunes femmes magnifiques qui semblent particulièrement s’intéresser à toi.” (Michel Tournier, Journal extime, 2002).

Le pou est-il aussi peu attrayant qu’on le pense ?

Dès le XVIIe siècle, cet insecte était déjà décrié, considéré comme une bête répulsive et dégoûtante. Selon le célèbre Dictionnaire universel de Furetière publié en 1690, le pou est décrit comme une “vermine qui se développe sur les animaux, les pique, mord et suce leur sang”. Il possède un visage ressemblant à celui d’un cochon, ses yeux se placent derrière ses cornes, et il est doté de plusieurs paires de pattes équipées de griffes capables d’agripper aux cheveux ou aux poils de ses victimes. La peau, très fine et translucide, laisse apparaître un réseau de veines. Sur le ventre, une peau marquée de points ou de taches blanches, en mouvement constant, ressemblant à un cœur en miniature. De nos jours, le pou est un insecte de moins de 3 millimètres, sans ailes, au corps aplati, qui adopte une coloration blanchâtre quand il est vide de sang et brune quand il s’est nourri. Il se déplace en rampant grâce à ses six pattes équipées de griffes, qu’il s’accroche solidement aux cheveux ou à la peau de ses hôtes.

Pourquoi associe-t-on “être laid comme un pou” à la déconsidération ?

Alors que l’aspect physique peu agréable du pou a influencé l’expression, c’est surtout la nocivité de cet insecte qui a conduit à son image négative. Étant un parasite sanguinaire, il se nourrit en perforant la peau de ses victimes pour aspirer leur sang. La présence de poux, notamment chez l’enfant, causait de fortes démangeaisons et des lésions inflammatoires dues au grattage. Leur reproduction rapide, avec des œufs appelés lentes, facilitait la contamination et la propagation. Par extension, l’expression “laid comme un pou” évoque moins la laideur physique que la nuisance et la dangerosité associées à ces parasites.

D’où vient cette expression ?

Les premiers exemples documentés de l’expression “laid comme un pou” remontent au XVIIIe siècle, notamment dans la 5e édition du Dictionnaire de Tendances et animaux en 1798, où il est indiqué que cette comparaison est couramment utilisée pour désigner une personne très laide. À cette époque, le pou, considéré comme porteur de maladies et de parasites, incarnait également l’avidité, comme le montre une description de 1694 du Dictionnaire de l’Académie française : “On emploie l’expression d’un homme gueux et avide, qui cherche à accumuler de l’argent, en disant qu’il est comme un pou affamé”. Depuis lors, la connotation péjorative s’est amplifiée, associant la mollesse, l’envie ou l’orgueil à cette image dévalorisante, donnant naissance à diverses expressions telles que “jaloux comme un pou” ou “fier comme un pou”.

Un malheur ou une punition symbolique ?

Initialement, la représentation du pou véhiculait aussi une idée morale, où la laideur ou l’état infectieux de l’insecte étaient liées à des notions de déchéance morale. Autrefois, sa présence était vue comme le reflet de la négligence ou de la pauvreté extrême. Par la suite, l’image du pou a été utilisée pour symboliser le châtiment réservé à certains dirigeants ou figures puissantes. Par exemple, la maladie appelée phtiriase a été considérée comme une punition divine ou un signe de faute morale. Selon des récits anciens, des tyrans comme Sylla ou Hérode auraient été atteints de poux, une épreuve manifeste de leur démesure ou de leur immoralité. Ces références historiques illustrent comment cet insecte est devenu un symbole de malédiction ou de honte accumulée.

Crédit photo : Gilles San Martin