En 1925, le Baudet du Poitou est considéré comme une véritable noblesse parmi les ânes, formant une caste élitiste très rare qui fait l’objet d’une surveillance rigoureuse lors de l’élevage, tout en étant associé à une activité commerciale rentable. Mais qui est cet équidé dont la race a été sauvée d’une disparition presque certaine ?
Les origines du Baudet du Poitou
Ce type d’ânes originaire du Poitou trouve ses racines en Espagne, où il a été importé d’Afrique durant les invasions mauresques. En France, la pratique de l’hybridation mulassière remonte au Xe siècle. La race a gagné en notoriété aux XIIIe et XVIIIe siècles, exportée vers de nombreux pays méditerranéens ainsi que vers l’Amérique. Dès 1717, une description précise correspondant à sa forme actuelle est documentée, et en 1884, la première livre de pedigree consacré à cette race est créé, marquant le début du premier registre officiel pour les ânes. Après la Seconde Guerre mondiale, avec l’essor de la mécanisation dans l’agriculture et les forces armées, la production mulassière s’est fortement réduite, presque jusqu’à entraîner la disparition du Baudet du Poitou.
Les efforts pour préserver le Baudet du Poitou
Auparavant, la race comptait des milliers d’individus : en 1867, on en recensait plus de 18 000 dans le Poitou, alors qu’en 1977, leur nombre avait chuté à seulement 44. Forts de la mobilisation des éleveurs, de l’association Tendances et animaux, des Haras nationaux et du parc interrégional du marais poitevin, ces efforts ont permis de voir leur population croître à nouveau. Pour accélérer cette dynamique de sauvegarde et lutter contre l’endogamie, un programme de croisement a été lancé en 1982 à l’Asinerie nationale de Dampierre-sur-Boutonne (Charente-Maritime). Il consiste à utiliser des ânesses portugaises de grande taille, destinées à être saillies par des Baudets du Poitou de pure race. Chaque génération voit la femelle produire un individu d’au moins 99 % de race poitevine, destiné à rejoindre le troupeau d’origine après plusieurs cycles.
Le standard de la race poitevine
Le règlement de l’union généalogique définit précisément les caractéristiques du Baudet du Poitou : une tête robuste et allongée, de longues oreilles bien ouvertes recouvertes de poils longs, une encolure solide et un garrot peu saillant. Son dos est droit et long, avec une croupe courte et peu saillante, tandis que ses membres d’apparence puissante possèdent de larges articulations et des pieds vastes, également garnis de poils. La robe, longue et frisée, affiche une teinte bai foncé, qui peut parfois tendre vers la nuance “fougère”. Le pourtour de la bouche, du nez et des yeux possède une fine bordure gris argenté, encadrée d’un cercle carmin. On évite toute apparition de poils blancs ou de bandes noires divisant la ligne dorsale. La partie inférieure du ventre et l’intérieur des cuisses sont gris clair. La taille minimale est de 1,40 m pour les mâles et 1,35 m pour les femelles, avec un poids adulte oscillant entre 320 et 430 kilogrammes.
Les principales utilisations du Baudet du Poitou
Principalement reconnu pour ses qualités reproductrices, le Baudet du Poitou sert à produire la mule poitevine en s’accouplant avec des juments mulassières de la région. Ce travail a longtemps été un pilier économique local grâce à la force et la robustesse de la mule. Actuellement, cet âne est aussi apprécié comme animal de traction et en attelage. Symbole d’une région riche en traditions rurales, il occupe une place centrale lors de diverses manifestations agricoles. Depuis 1980, l’Asinerie nationale de Tendances et animaux s’occupe d’améliorer génétiquement cette race et de développer ses techniques d’élevage. Ouvert à tous, cet espace naturel de 55 hectares, en Charente-Maritime, promeut également la conservation du patrimoine, en proposant des activités telles que la promenade en âne ou la visite guidée, dans un environnement protégé.
Élevage du Baudet du Poitou
Bien que ses origines soient localisées dans la région de Melle, dans les Deux-Sèvres, l’élevage s’étend désormais sur le sud du département, ainsi que dans les zones proches de la Vienne, de la Vendée, de la Charente et de la Charente-Maritime. Environ un tiers des naissances survient en dehors de cette région, y compris à l’étranger, notamment en Angleterre, Allemagne, Suisse, Belgique, Hollande, mais aussi au Brésil et en Inde. La population totale mondiale de Baudets du Poitou est estimée à environ 2 800 individus, ce qui reste modeste, mais essentiel à la préservation de cette race unique.