Le secteur de l’élevage de lapins a connu de nombreuses évolutions en lien avec les avancées technologiques et les changements sociétaux. En France, la tendance à la baisse de la consommation de viande de lapin met en difficulté cette filière. Notre exposé présente les principaux débouchés de la cuniculture, revient sur ses développements récents, et évoque le rôle du professionnel chargé de l’élevage.
Les objectifs principaux de la cuniculture
La principale finalité de cette activité est la production de viande. Sur la scène mondiale, la Chine demeure le leader incontesté dans ce domaine. En Europe, l’Espagne occupe la deuxième position, avec une légère avance sur l’Italie et la France. La majorité des élevages français pratiques l’insémination artificielle, ce qui optimise la gestion sanitaire grâce à une conduite en groupes homogènes. Ces groupes rassemblent des lapins de même âge, poids et stade physiologique, facilitant ainsi leur gestion sanitaire et leur nettoyage périodique. Le cycle de production d’une femelle est d’environ six semaines. En 2017, la moyenne de lapereaux par portée frôlait les 11, et chaque femelle produisait plus de 50 lapereaux annuellement.
Outre la viande, certains élevages se consacrent à l’exploitation du pelage d’angora, utilisé dans la fabrication textile. La controverse autour de la maltraitance de ces animaux a été relancée en 2019 par l’association Tendances et animaux, mais une instance comme le Conseil d’État a confirmé que les méthodes de récolte, notamment le peignage, respectaient les standards. Un lapin peut fournir jusqu’à un kilogramme de poils par an, une quantité suffisante pour réaliser une vingtaine de pelotes. À leur apogée dans les années 1960, la France produisait environ 300 tonnes de laine angora, mais la concurrence internationale, notamment chinoise et sud-américaine, a depuis réduit cette production à moins de deux tonnes.
La filière de fourniture de lapins pour la recherche en laboratoire constitue un autre segment de ce secteur. Par ailleurs, certains éleveurs participent également à des compétitions et concours de races lors de foires agricoles ou d’expositions. La Fédération française de cuniculiculture, fondée en 1961 par des passionnés, veille à la réglementation, organise des événements et défend les intérêts des éleveurs ; elle participe aussi à l’amélioration des pratiques d’élevage.
Une histoire récente en développement
Bien que la cuniculture ait ses origines au Moyen Âge en Europe, sa véritable expansion mondiale a été façonnée au cours du XXe siècle. Entre les deux guerres mondiales, les exploitations de grande taille (plus de 100 femelles) se multiplient, accompagnées du développement de races plus performantes. La mise en place des pratiques modernes commence en 1928 en Floride, où l’élevage sur grillage et la nutrition granulée deviennent la norme, permettant de limiter la coccidiose et d’optimiser l’alimentation. La Chine commence à s’intérêt à cette production dans les années 1980.
Au fil du temps, la dispersion en milieu familial a diminué, laissant la place à de grandes exploitations. La vaccination contre la myxomatose, déclenchée en 1952, a permis à certaines structures de perdurer. L’amélioration génétique par croisements successifs a été renforcée par l’usage accru d’hormones pour stimuler la reproduction. La pratique de la insémination artificielle s’est sophistiquée dans les années 1980, permettant d’induire les chaleurs grâce à des injections hormonales. La méthode de gestion en groupes a connu une adoption progressive dans les années 1990, tout comme l’usage généralisé de techniques de reproduction assistée.
Ce mode d’élevage possède plusieurs avantages : il exige un investissement modéré, l’exploitation d’un élevage de 450 femelles peut assurer un revenu équivalant à 1,5 fois le SMIC, et il reste majoritairement familial, avec une ou deux personnes en charge. La facilité de manipulation du lapin, sa faible exigence physique, en font une activité accessible à un grand nombre, notamment aux femmes. De plus, son régime herbivore compatible avec de matières végétales peu consommées par l’homme — comme la paille ou la luzerne — valorise des ressources non alimentaires.
Consommation moderne de la viande de lapin
Considérée comme une viande aux qualités nutritionnelles remarquables, la viande de lapin est riche en protéines, faible en lipides, en sodium, mais fournit également une bonne quantité de minéraux et d’acides gras oméga 3, essentiels pour le fonctionnement du cerveau, de la rétine ou du système nerveux, que l’organisme ne synthétise pas lui-même.
Cependant, en 2018, bien que 80 % des Français déclarent consommer du lapin, seuls 15 % en mangent régulièrement, avec au moins une repas par mois. Ce chiffre a décru par rapport à 2010, où c’était 10 % de plus. Le déclin de la consommation s’explique notamment par une moindre fréquence de pensée à l’achat, ainsi que par le prix, qui constitue un obstacle important. La part du coût de l’alimentation animale représente souvent entre 40 et 60 % des coûts totaux de production, pouvant atteindre 70 % avec certains investissements ou automatisations. En 2017, cet élément correspondait à plus de la moitié du prix de vente en élevage conventionnel, ce qui incite à rechercher des solutions d’optimisation pour améliorer la rentabilité.
Le métier d’ouvrier cunicole
Ce métier peu médiatisé d’éleveur de lapins requiert des compétences pour gérer aussi bien des élevages hors-sol que sur sol. Il doit veiller à maintenir un environnement adéquat (température, espace disponible) avant l’arrivée des animaux, puis assurer leur alimentation, leur surveillance quotidienne et leur suivi sanitaire.
Une bonne connaissance de l’anatomie, de la physiologie et des maladies des lapins est essentielle, tout comme la maîtrise des techniques de reproduction. Pour accéder à cette profession, il est conseillé d’obtenir un brevet professionnel en gestion d’exploitation agricole ou un baccalauréat professionnel en conduite et gestion agricoles. Cependant, une solide expérience en élevage peut également suffire. Pour occuper des postes de responsabilité ou d’encadrement, un BTS en production animale ou gestion d’exploitation agricole peut être exigé.