La queue d’un lézard repousse-t-elle après avoir été sectionnée ? Analyse et explications

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La capacité de certains animaux à repousser une partie de leur corps fascine depuis toujours. Les scientifiques s’intéressent de près à ces phénomènes, espérant un jour pouvoir appliquer ces mécanismes à la médecine humaine. Parmi ces créatures, le lézard est souvent cité comme un exemple potentiel de progrès thérapeutique, notamment en ce qui concerne la régénération de tissus. Mais la question se pose : sa queue peut-elle réellement repousser après une coupure, et comment cela fonctionne-t-il ?

Le processus d’autotomie

L’autotomie désigne la faculté de certains animaux à se départir volontairement d’un membre ou d’une partie de leur corps lorsqu’ils sont confrontés à un danger. Ce terme, d’origine grecque, combine « auto- » signifiant « soi-même » et « -tomie », qui dérive de « temnein », signifiant « couper ». Chez la majorité des reptiles, notamment certains lézards, cette capacité concerne principalement la queue. Lorsqu’un prédateur saisit la queue ou lors d’une fuite précipitée, l’animal peut la détacher pour distraire son poursuivant. Immédiatement après, cette partie amputée peut continuer à s’agiter, un phénomène qui peut durer jusqu’à une heure, offrant ainsi au lézard une chance de s’échapper.

La raison pour laquelle cela ne porte pas préjudice majeur réside dans l’absence d’organes vitaux dans la queue. Ce mécanisme réflexe est le fruit d’une longue évolution, au cours de laquelle la structure du corps de l’animal s’est adaptée pour permettre cette éjection. En effet, certaines vertèbres sont conçues pour se briser facilement, libérant ainsi la queue. La composition de cette dernière inclut non seulement des os, mais aussi des muscles agencés de manière spécifique, ainsi qu’une peau fine. La moelle épinière et la peau s’en détachent facilement, des vaisseaux sanguins pouvant se contracter rapidement pour limiter les pertes sanguines.

Le phénomène de régénération après coupure

Après avoir perdu leur queue, certains lézards peuvent la faire repousser, mais celle-ci ne sera pas identique à l’originale. La régénération démarre à partir de la zone de la coupure, mais le nouvel appendice ne retrouve pas forcément sa taille ou sa forme initiale. Il faut en moyenne plus de deux mois pour que la nouvelle queue devienne fonctionnelle, un processus porté par la production de molécules spécifiques appelée myosiverine.

La nouvelle queue se constitue d’un simple tube cartilagineux remplaçant les vertèbres, et les muscles sont reconstruits, mais sans vaisseaux sanguins capables de se contracter, ce qui limite l’efficacité de cette régénération. La couleur et la longueur de la queue reconstruite diffèrent quelque peu de l’originale, et la nouvelle structure ne peut se sectionner qu’au niveau des vertèbres situées plus haut que la zone de reconstruction.

Les modifications au niveau cellulaire

Des études menées sur l’espèce Niveoscincus ocellatus ont permis d’observer de près ce qui se passe lors de cette régénération. En particulier, l’analyse des télomères, ces segments d’ADN situés aux extrémités des chromosomes, révèle des effets insoupçonnés. La longueur de ces télomères est un indicateur de la longévité cellulaire ; plus ils sont longs, plus les cellules vivent longtemps.

Les résultats montrent que la régénérescence de la queue entraîne une augmentation du stress oxydatif dû à une division cellulaire accrue et à des modifications métaboliques. Ce stress provoque une réduction de la longueur des télomères, ce qui peut compromettre la croissance, la reproduction, la capacité immunitaire et, à terme, la survie de l’animal. En d’autres termes, cette capacité de régénération a un coût biologique qu’il ne faut pas négliger.

Perspectives pour la médecine humaine

Bien que comprendre comment le lézard régénère sa queue ne permette pas encore de développer une technique comparable pour réparer les tissus humains, cette recherche ouvre des perspectives intéressantes. Notre corps possède déjà des mécanismes naturels de cicatrisation, qui permettent de refermer une plaie et de former une cicatrice. Cependant, l’étude des processus de régénération chez le lézard pourrait aider à améliorer ces mécanismes, notamment pour traiter des maladies ou des lésions plus complexes.

Par exemple, cette connaissance pourrait un jour contribuer à soigner des malformations congénitales, à réparer la moelle épinière endommagée ou encore à traiter l’arthrite en régénérant le cartilage articulaire. Lors de la reconstruction de leur queue, les lézards produisent principalement du cartilage, ce qui pourrait inspirer des traitements pour restaurer les tissus cartilagineux au niveau des doigts, des genoux ou des chevilles. Bien que ces applications concrètes soient encore à l’horizon, la recherche dans ce domaine promet de nombreuses avancées futures.