Requin-lutin et requin-gobelin : des espèces fascinantes aux mâchoires étonnantes

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Doté de traits qui rappellent ses ancêtres, notamment un museau pointu en forme de V, le requin-lutin est souvent considéré comme un vestige vivant du passé. Résidant dans les zones profondes des océans, cette créature présente des caractéristiques étonnantes, telles qu’une mâchoire capable de se projeter vers l’avant pour capturer ses proies. Une autre particularité remarquable est sa peau translucide. Voici un focus sur une mystérieuse espèce rarement observée, dont le mode de vie continue de révéler de nombreux secrets.

Quelle est la nature de l’animal qu’est le requin-lutin ?

Le requin-lutin, ou Mitsukurina owstoni, appartient à la famille des mitsukurinidae et constitue aujourd’hui la seule espèce vivante de l’ordre des lamniformes. Il fait partie des poissons cartilagineux appelés élasmobranches, qui se distinguent par leur mâchoire qui n’est pas solidement fixée au crâne, permettant une certaine mobilité. Ces caractéristiques expliquent son mystère et son apparence singulière.

Quelle est l’origine de ce requin aux caractéristiques primitives ?

Datant d’environ 125 millions d’années, cette espèce a conservé des traits ancestraux qui lui valent le titre de véritable vestige vivant. La première observation documentée remonte à la fin du XIXe siècle, au large du Japon, où un spécimen de 1,5 mètre a été pêché. Son nom évoque des créatures légendaires japonaises, dotées de nez longs et de visages rouges, tandis que la traduction anglophone « goblin shark » fait référence à un petit être fantastique du folklore européen, en raison de son aspect étrange.

Comment reconnaît-on le requin-gobelin ?

Ce requin mesure généralement entre 3 et 4 mètres de long et pèse environ 200 kilos. Les femelles, souvent plus imposantes que les mâles, peuvent atteindre 6 mètres. Son corps est caractérisé par des nageoires dorsales petites et arrondies, tandis que les nageoires pelviennes et l’anale sont plus développées avec des bases allongées. La nageoire caudale, asymétrique, est dépourvue de lobe inférieur, ce qui lui confère une poussée limitée, se traduisant par une nage plus lente. Son museau particulièrement proéminent, en forme de V, dépasse nettement de sa tête, accentuant son allure distincte.

La peau du requin-lutin est-elle vraiment transparente ?

Ce poisson préhistorique présente une coloration semi-transparente, une caractéristique inhabituelle parmi les requins. Cette transparence résulte d’un manque de pigment, laissant entrevoir la coloration rosée des vaisseaux sanguins visibles à travers sa peau. La teinte rosée provient du sang oxygéné circulant dans ses capillaires. La surface de sa peau, semblable à du caoutchouc, est protégée par des structures ressemblant à des écailles mais qui sont en réalité des denticules dermiques, des dents modifiées recouvertes d’émail dur, typiques des poissons cartilagineux.

Pourquoi le requin-lutin est-il appelé « lanceur de mâchoires » ?

Ce requin possède une mâchoire large avec de longues dents pointues sur la partie supérieure et inférieure. Certaines dents, moins acérées, sont adaptées au broyage. La particularité la plus impressionnante réside dans sa capacité à projeter rapidement sa mâchoire vers l’avant pour attraper ses proies, après quoi elle se rétracte pour être utilisée à nouveau. La vitesse de cette projection atteint 3 mètres par seconde, et la mâchoire peut s’étendre jusqu’à 10 % de la longueur totale du poisson. Cette adaptation de chasse, liée à la vie à de grandes profondeurs où la nourriture se raréfie, représente une évolution naturelle pour ce poisson, qui ne peut pas compter sur une nage puissante.

Dans quels endroits vit le requin-gobelin ?

Ce requin se trouve dans les trois principaux océans du monde : Atlantique, Pacifique et Indien. Une grande partie des observations fait référence aux eaux japonaises, où de nombreux spécimens ont été repérés. Des apparitions moins fréquentes ont également été signalées en Afrique du Sud, en Nouvelle-Zélande, en Californie, en Guyane, au Suriname, à Madère, au Sénégal, au Portugal, dans le golfe de Guinée et au Mexique. Il évolue dans la zone mésopélagique, entre 200 et 1000 mètres de profondeur, une région où la lumière du soleil ne pénètre pas, souvent appelée zone aphotique ou crépusculaire.

Que mange ce requin mystérieux ?

Ce chasseur carnivore se nourrit principalement de petits poissons, de céphalopodes et de crustacés tels que calamars, poulpes, crabes et crevettes. Faible en vue, il utilise ses ampoules de Lorenzini, qui détectent les faibles champs électriques émis par ses proies enfouies dans le sable, notamment par leur rythme cardiaque. Ces organes sensoriels, situés sur son museau, sont caractéristiques des requins et autres poissons cartilagineux. Le requin-lutin chasse surtout tôt le matin ou en fin d’après-midi, lorsque ses proies sont actives.

Comment se déroule la reproduction du requin-lutin ?

Très peu connu, le mode de reproduction de cette espèce reste mystérieux en raison de la difficulté à l’étudier dans ses profondeurs. Aucun spécimen femelle enceinte n’a été observé. Sur la base du comportement d’autres requins, il est supposé que les mâles deviennent matures vers 2,60 mètres, tandis que les femelles atteindraient 4 mètres. Comme d’autres lamniformes, il devrait être ovovivipare, avec des embryons qui se développent à l’intérieur de la mère et se nourrissent d’autres œufs (œphages). Lors de la gestation, la femelle libère ses petits lorsqu’ils sont pleinement formés, et ceux-ci s’émancipent rapidement après la naissance.

Le requin-lutin est-il en danger ?

Bien que son apparence puisse effrayer, le requin-lutin ne représente aucune menace pour l’homme. Rares et difficiles à capturer ou à observer à cause de sa vie dans des profondeurs inaccessibles, il demeure un animal mystérieux. Quelques jeunes ont été accidentellement capturés, principalement dans les zones de pêche en eaux profondes. La population et l’état de conservation restent inconnus, en raison du manque de données fiables. La classification officielle, par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), le situe dans la catégorie « préoccupation mineure » ; cependant, son espérance de vie n’a pas encore été déterminée, laissant plusieurs questions en suspens.

Crédit photo : Dianne Bray / Museum Victoria