Chaque printemps, la France voit revenir des milliers d’hirondelles qui ont passé l’hiver dans des régions plus chaudes en Afrique. Aujourd’hui, ces oiseaux, symboles de la saison printanière, sont de moins en moins nombreux à choisir notre pays pour se reproduire. Depuis quand observe-t-on cette baisse, et quelles en sont les raisons ? Dans cet article, nous mettons en lumière les deux principales espèces qui nichent en France et explorons les causes du déclin de leur population.
Les espèces d’hirondelles présentes en France
Les deux types d’hirondelles que l’on rencontre régulièrement chaque année sont l’hirondelle de fenêtre (Delichon urbicum) et l’hirondelle rustique (Hirundo rustica). Focus sur ces deux oiseaux :
L’hirondelle de fenêtre
Facile à identifier grâce à son ventre et sa gorge blancs, son dos noir bleuté et sa queue en forme de fork, cette espèce est omniprésente en France. Elle aime établir son nid en milieu urbain, notamment sur les façades des bâtiments, sous les rebords de toit, ou encore sur les ponts. Elle construit un nid en utilisant de la boue, souvent en forme de coupe, qui revient occuper chaque année au même endroit. Son habitat d’hivernage s’étend de la zone sahélienne jusqu’en Afrique du Sud, avec des routes migratoires variables selon les populations. Les oiseaux d’Europe de l’Ouest parcourent environ 5 000 km chaque année, tandis que ceux venant des régions scandinaves peuvent parcourir jusqu’à 11 000 km.
L’hirondelle rustique
Nomée également hirondelle de cheminée, cette espèce se distingue par sa gorge d’un rouge brique, son dessus noir iridescent aux reflets bleutés, contrastant avec son dessous blanc teinté de roux. Plus adaptée aux campagnes que sa voisine, elle vit dans un peu partout dans le monde, sauf aux pôles. Elle aime fréquenter les bâtiments d’élevage ou autres constructions où l’on trouve des mouches, sa nourriture favorite. Appelée aussi “hirondelle des granges”, cette migratrice passe l’hiver en Afrique équatoriale. Elle arrive dans le sud de la France dès la fin février et, très sociable, peut former des groupes de plusieurs centaines d’individus, notamment lors des périodes de non-reproduction, partageant les fils ou les toitures pour dormir. Son parcours migratoire annuel peut atteindre 12 000 km en fonction de sa zone de résidence.
La diminution des hirondelles : réalité ou fantasme ?
La chute du nombre d’hirondelles qui viennent nidifier en France n’est pas une illusion récente. Selon le Suivi Temporel des Oiseaux Commun, depuis 1989, leurs populations ont connu une importante baisse : 42 % pour l’hirondelle de fenêtre et 8 % pour l’hirondelle rustique. L’hirondelle de fenêtre figure aujourd’hui sur la liste rouge des espèces menacées en France, classée par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature. Sa situation s’est aggravée, passant d’un statut de “préoccupation mineure” en 2008 à “quasi-menacé” en 2016. En Europe, ses effectifs ont diminué de 26 % entre 1980 et 2019. En Espagne par exemple, la société ornithologique locale estime que chaque année, 500 000 hirondelles disparaissent. Ce déclin ne concerne pas seulement ces deux espèces, mais touche tous les oiseaux en ville comme en campagne.
Les facteurs du déclin des hirondelles
Plusieurs éléments expliquent pourquoi ces oiseaux deviennent de plus en plus rares. Parmi eux :
La destruction de leurs nids
Certains propriétaires considèrent que les fientes d’hirondelles souillent leur façade et détruisent leurs nids avec des outils puissants. Parfois, cette destruction est accidentelle lors de rénovations ou de travaux de nettoyage qui peuvent dissoudre ou endommager leurs habitats.
L’utilisation de nouveaux matériaux de construction
Les bâtiments modernes ont souvent des façades lisses et de grandes surfaces vitrées. Ces surfaces ne permettent pas aux hirondelles de s’accrocher pour construire leurs nids, ce qui limite leur capacité à s’installer.
Les pesticides
Les produits phytosanitaires broient la chaîne alimentaire des hirondelles, qui se nourrit principalement d’insectes. En Europe, la disparition de trois quarts des insectes volants en 30 ans a déjà été observée. Bien que leur usage soit réglementé en Europe, leur emploi demeure répandu dans les régions d’Afrique où ces oiseaux hivernent.
L’intensification de l’agriculture
Les pratiques agricoles modernes ont destructuré leur habitat, transformant les prairies, comblant les mares, asséchant les bocages, ou encore supprimant les bâtiments agricoles. En conséquence, l’accès à leur nourriture et à des sites de nidification s’en trouve sérieusement réduit.
Le changement climatique
Le climat devient de plus en plus imprévisible, avec des événements météorologiques extrêmes tels que vagues de froid, inondations ou canicules. Ces perturbations affectent à la fois leurs sites de nidification et d’hivernage.
Les prédateurs
Des ennemis naturels comme le chat domestique, la fouine, certains rapaces ou encore le lérot (petit rongeur) pillent leurs nids pour dévorer leurs œufs ou jeunes.
Pourquoi est-il important de préserver les nids d’hirondelles ?
En France, les hirondelles bénéficient d’un dispositif de protection légale, inscrit dans la loi du 10 juillet 1976 et l’arrêté du 29 octobre 2009. Il est strictement interdit de détruire ou d’altérer leurs nids, de capturer ou d’enlever ces oiseaux, même en période hivernale. Il est également prohibé de leur porter intentionnellement atteinte dans leur environnement naturel, surtout durant leur saison de reproduction. La loi interdit aussi la détention, le transport, la vente ou l’usage commercial des hirondelles. Toute infraction peut entraîner jusqu’à 3 ans de prison et une amende de 150 000 euros.