Les mécanismes permettant à un pigeon voyageur de s’orienter dans l’espace demeurent encore en grande partie mystérieux. Les scientifiques poursuivent leurs recherches pour percer les secrets de cette capacité étonnante. Cet article propose un état des lieux des connaissances actuelles.
Il est indéniable : lorsqu’un pigeon est relâché dans un environnement inconnu, il peut retrouver son chemin jusqu’à son colombier. La précision et la rapidité avec lesquelles ces oiseaux parviennent à rejoindre leur lieu d’origine, même après des centaines de kilomètres, ont toujours fasciné l’humanité. Plusieurs hypothèses évoquent l’utilisation simultanée de sources comme le soleil, les étoiles, le champ magnétique terrestre ou encore les odeurs pour s’orienter. Mais concrètement, comment cela fonctionne-t-il ?
la mémoire des pigeons
Le cerveau de ces oiseaux possède une densité neuronale six fois supérieure à celle du cerveau humain. La distance entre deux neurones y étant moitié moindre, ils traitent rapidement l’information. Malgré l’absence d’un cortex cérébral élaboré, ils sont capables d’apprentissages sophistiqués : mémorisation de mots, apprentissage de règles simples ou de concepts numériques. Toutefois, cette mémoire ne semble pas suffisante pour expliquer leur capacité à retrouver un lieu qu’ils n’ont jamais vu, surtout dans le cas de lâchers en territoire inconnu. Les chercheurs pensent qu’ils construisent plutôt une sorte de représentation mentale de leur environnement, où le positionnement du soleil dans la journée et la position des étoiles durant la nuit jouent un rôle clé.
capacités visuelles impressionnantes
Les pigeons sont capables d’identifier des cellules cancéreuses sur des images de biopsies, ce qui témoigne de leur aptitude visuelle supérieure. Leur perception des couleurs repose sur des photorécepteurs, les cônes, dont ils disposent en plus grand nombre que les humains. En effet, ils sont tétrachromates, ce qui leur confère la faculté de détecter l’ultraviolet, une gamme que nous ne percevons pas. Cela leur permet de distinguer des objets qui nous apparaissent identiques en couleur. Cette aptitude exceptionnelle contribue probablement à leur stratégie d’orientation, en utilisant les rayons solaires ou stellaires comme points de repère dans l’espace.
l’odorat, un sens moins primordial ?
Des expériences ont examiné si l’odorat contribuait à leur navigation. Des pigeons non entraînés ont vu leur nerf olfactif ou leur nerf trijumeau sectionné certifiant ou non leur capacité à revenir à leur pigeonnier. Les résultats montrent que la majorité des pigeons privés de leur sens olfactif ont eu beaucoup plus de mal à revenir, surtout comparés à ceux qui conservaient leur sens du magnétisme. La différence de temps de retour (de 24 heures contre un jour de plus) indique une importance non négligeable de l’olfaction.
le rôle du champ magnétique terrestre
Leur capacité à percevoir le champ magnétique de la Terre constitue une autre piste de navigation. Des expériences dans lesquelles un aimant était fixé sur un pigeon ont démontré que cette perturbation empêchait l’animal de retrouver son pigeonnier. La Terre, dont le noyau en fusion génère le champ magnétique, fournit un signal que certains animaux, y compris les pigeons, semblent détecter grâce notamment au nerf trijumeau. Ils sont sensibles aux anomalies, comme les tempêtes solaires ou formations géologiques rares, qui altèrent ce champ.
la perception de la gravité
Les variations de la gravité à la surface de la planète, en fonction de la répartition des masses, pourraient également influencer le parcours des pigeons. Des expérimentations en Ukraine, dans un cratère de 25 km de diamètre, ont montré que ces oiseaux, lâchés à proximité du cratère, évitaient le chemin le plus direct, ce qui suggère qu’ils utiliseraient un sens gravitationnel pour s’orienter. Ce mécanisme, encore mal compris, pourrait compléter leur système de navigation.
des mystères encore à élucider
Bien que la compréhension du repérage spatial chez les pigeons ait progressé, de nombreuses questions restent sans réponses : comment ces différentes facultés collaborent-elles entre elles ? La perception du champ magnétique est-elle innée ou acquise grâce à l’expérience ? La navigation par les repères visuels, olfactifs, ou magnétiques ne fonctionne-t-elle pas en cas de mauvais temps ou sous des conditions météorologiques défavorables ? La recherche continue de fournir des pistes prometteuses pour mieux comprendre ces extraordinaires capacités. La curiosité scientifique à leur sujet ne faiblira probablement pas de sitôt, et de nouvelles découvertes viendront encore enrichir nos connaissances.