Le regard perçant d’un jaune vif, un pelage sombre, des doigts très effilés et des longues dents confèrent à l’aye-aye une allure peu rassurante. Discrédité dans le folklore malgache comme étant une créature maléfique, cet animal est aujourd’hui menacé d’extinction. Découvrez l’un des rares primates nocturnes, petit en taille mais impressionnant par ses caractéristiques, qui mérite toute notre attention.
Quelle est la famille biologique de l’aye-aye ?
Malgré ses ressemblances avec certains singes, l’aye-aye (Daubentonia madagascariensis) est classé parmi les primates. Unique représentant de son genre, il constitue aussi le seul membre de la famille des daubentonidés après la disparition de son proche cousin, l’aye-aye géant, il y a environ un millénaire. Endémique à Madagascar, il est généralement importé dans d’autres régions. Avec une taille comprise entre 75 et 90 cm, la moitié de laquelle correspond à sa queue, et un poids oscillant entre 2 et 3 kg, il détient la distinction d’être le plus imposant primat nocturne de la planète.
Quelle est l’histoire de la découverte de l’aye-aye ?
Il y a des dizaines de millions d’années, des lémuriens ayant pour origine le continent africain auraient été transportés jusqu’à Madagascar par voie fluviale ou lors de processus naturels liés aux courants océaniques. Les premières notes scientifiques de l’aye-aye datent du XVIIIe siècle, notamment dans l’ouvrage de Pierre Sonnerat, Voyage aux Indes Orientales et à la Chine, paru en 1782. À cette période, le naturaliste allemand Johann Friedrich Gmelin le désignait sous le nom de Sciurus madagascariensis, le rapprochant ainsi des écureuils du genre Sciurus. Plus tard, en 1795, l’historien français Étienne Geoffroy Saint-Hilaire lui attribua un genre spécifique, Daubentoni, en hommage à Louis Jean-Marie Daubenton, son mentor en zoologie.
Quel est l’aspect physique de l’aye-aye ?
Ce petit primate présente un pelage brun, sauf sur la tête et le dos, qui arborent une teinte blanche. Sa queue longue et touffue est un de ses traits caractéristiques. Il possède aussi de grandes oreilles arrondies et de yeux jaunes cerclés de noir, qui lui donnent un regard expressif. La différence la plus marquante réside dans ses doigts très fins et allongés, notamment la troisième phalange, qui est exceptionnellement prolongée. Ses extrémités sont équipées de griffes acérées. Chez cette espèce, il n’y a pas de différence de sexe visible à l’œil nu.
En quoi l’aye-aye se distingue-t-il des autres primates ?
La particularité principale de l’aye-aye réside dans sa dentition. Il possède un peigne dentaire, une structure composée de dents longues et plates à l’avant, regroupant incisives et canines inférieures. Ce primate possède aussi un nombre réduit de dents – seulement 18 – alors que la majorité des autres primates en ont entre 30 et 36. Cette évolution lui a valu de développer une oligodontie. À l’instar des rongeurs, ses incisives poussent en continu et s’affinent en rongeant du bois.
Quelle est la zone d’habitat de l’aye-aye ?
Exclusif à Madagascar, l’aye-aye vit principalement dans les forêts tropicales humides situées à plus de 700 mètres d’altitude. Son territoire est réparti sur environ 600 hectares, concentré notamment dans le nord-est de l’île, autour de Maroantsetra (région de l’îlot Mangabe) ou dans le parc national d’Andasibe-Mantadia, dans la région de la montagne d’Ambre. D’autres zones protégées, notamment le parc Tsingy de Bemaraha ou la réserve d’Anjajavy, accueillent également cet animal en voie de disparition.
Que mange l’aye-aye ?
Ce mammifère, à la fois insectivore et frugivore, se nourrit principalement de fruits, de nectar, de graines, de champignons et d’insectes. Doté de grandes oreilles qui lui permettent l’écholocalisation, il localise ses proies dans l’écorce des arbres comme un chauve-souris. Il tapote le bois avec ses doigts fins pour repérer les mouvements, puis, à l’aide de son ouïe fine, détecte les bruits émis par les larves ou insectes xylophages. Enfin, il déchire l’écorce à l’aide de ses incisives et insère sa longue phalange pour capturer ses aliments, qu’il avale ensuite.
Quel mode de vie adopte l’aye-aye ?
Ce primate solitaire et nocturne est difficile à observer, car il reste caché durant la journée et ne sort que pour se nourrir le soir. Son comportement individuel et son absence de vie en groupe compliquent encore son étude. La compétition entre mâles peut conduire à des affrontements mortels, tandis que la sociabilité entre sexes différents est limitée à la période de reproduction. La reproduction se déroule toute l’année, mais elle nécessite la disponibilité d’un partenaire réceptif. La femelle ne se reproduit que tous les 2 à 3 ans, après une période de cycle.
Comment se reproduit l’aye-aye ?
Les couples construisent généralement plusieurs nids cachés en hauteur dans les arbres, entre 10 et 15 mètres du sol, en utilisant des feuilles. Après une gestation d’environ 5 mois, la femelle donne naissance à un seul petit, pesant une centaine de grammes. Elle en prend soin durant sa première année, le temps que l’enfant devienne autonome. La maturité sexuelle est atteinte vers 1 an et demi pour le mâle, et environ 2 ans et demi pour la femelle.
Une figure mal comprise, victime de superstitions ?
Depuis des siècles, les lémuriens souffrent d’une mauvaise réputation en raison de leur nom, qui dérive du latin « lemures », évoquant des âmes errantes. L’aye-aye en particulier subit des persistent idées négatives en raison de son apparence et de ses activités nocturnes. Beaucoup de tribus malgaches croient que sa présence annonce un malheur ou un mauvais sort. Sa silhouette étrange et ses légendes associées ont conduit à la persécution de l’espèce, réduit ses populations et renforcé sa méfiance auprès de l’humain.
Pourquoi l’aye-aye est-il en danger ?
La principale menace pour cette espèce vient du fossa, un carnivore endémique de Madagascar. Malheureusement, l’homme joue aussi un rôle déterminant dans leur déclin : déforestation pour l’exploitation forestière, braconnage, destruction de leur habitat par des agriculteurs soucieux de protéger leurs cultures, ainsi que les croyances locales qui mènent à leur élimination. Depuis 2014, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) classe l’aye-aye parmi les espèces en voile d’extinction. Des efforts de conservation, comme la création de zones protégées, ont été engagés pour préserver ce primate exceptionnel, qui peut vivre jusqu’à environ 26 ans.