Considéré comme l’ancêtre sauvage de notre bœuf domestique, l’aurochs a disparu depuis longtemps. Sur les murs des grottes du Paléolithique supérieur, des gravures anciennes immortalisent cet animal primitif. Actuellement, la recherche scientifique s’efforce de recréer cette espèce disparue.
L’aurochs, un animal à la longue histoire
Appartenant à la famille des bovidés et à l’ordre des artiodactyles, l’aurochs, dont le nom scientifique est Bos primigenius, aurait vu le jour il y a près de deux millions d’années en Inde. Progressivement, il aurait migré vers le Moyen-Orient, puis à travers l’Asie, l’Europe et l’Afrique du Nord. Son image est fréquemment retrouvée dans l’art paléolithique, notamment dans des grottes célèbres telles que Lascaux, Chauvet ou Font-de-Gaume.
L’aurochs, un ancêtre sauvage domestiqué
Lors de ses variations géographiques, on reconnaît trois principales sous-espèces d’aurochs :
– celles présentes en Europe et au Moyen-Orient (Bos primigenius primigenius)
– celles d’Asie, plus précisément indiennes (Bos primigenius namadicus)
– celles localisées en Afrique du Nord (Bos primigenius africanus)
L’élevage et la domestication de cette bête sauvage, qui aurait commencé vers 8 000 ans avant notre ère, ont façonné certaines races de bovidés que l’on connaît aujourd’hui.
L’aurochs, un animal bien plus grand que le bœuf moderne
Cette créature se distinguait par ses longues membres, la taille générale étant nettement supérieure à celle des bovins domestiques actuels. Son crâne lourd, doté d’un front aplati et étroit, supportait de grandes cornes en forme de lyre pointant vers l’avant. Chez le mâle, la taille pouvait atteindre entre 1,60 et 1,80 mètres au garrot, avec un poids allant jusqu’à 1 000 kilogrammes, tandis que la femelle mesurait environ 1,50 mètres. La sexual dimorphie était très prononcée : ses cornes pouvaient mesurer jusqu’à un mètre d’envergure, contre 70 cm pour la femelle. Les peintures rupestres donnent un aperçu de sa robe : un pelage brun-noir avec une ligne claire le long de la dosée, et une teinte brun-rougeâtre à la naissance pour la vache.
La présence historique de l’aurochs en France
Initialement rencontré en Inde, au Moyen-Orient, en Asie, en Europe et dans le nord de l’Afrique, l’habitat privilégié de l’aurochs demeure incertain. Certains spécialistes évoquent des zones marécageuses, des forêts humides, ou encore des vallées fluviales et deltas. À l’origine, il aurait également vécu dans des milieux moins humides. En France, la présence de cet animal sauvage a été attestée jusqu’au XIIe siècle, notamment dans le massif des Vosges. Par la suite, son aire de répartition s’est restreinte à des régions telles que la Pologne, la Moldavie, la Lituanie, la Prusse et la Transylvanie, régions aujourd’hui intégrées à l’Allemagne et à la Roumanie.
La vie en tribu de l’aurochs
Selon les descriptions, ces herbivores se nourrissaient principalement d’herbes, de graminées durant la belle saison, et, en période plus rude, de glands, d’écorces, de feuilles ou de branches. Leur mode de vie impliquait des déplacements constants, en troupeaux, pour suivre les ressources alimentaires. Les mâles menaient souvent une vie plus solitaire ou en petits groupes, tandis que les femelles s’organisaient en petites communautés avec leurs jeunes. Leur tempérament était considéré comme vif, parfois agressif ou même dangereux pour l’homme, mais certains relatent qu’ils pouvaient se montrer approchables si on ne leur faisait pas de mal, tout en pouvant devenir très hostiles face à une menace.
L’extinction de l’aurochs
Pendant les dix mille dernières années, leur principale menace provenait aussi bien des prédateurs naturels — lions, tigres, loups — que de la chasse humaine. Au Moyen Âge, en Europe de l’Est, la chasse à l’aurochs était une activité réservée aux nobles, avec un droit initialement ouvert à tous, puis strictement contrôlé. À cause de leur déclin rapide, la chasse a finalement été interdite, et des mesures de protection furent mises en place, telles que la gestion de zones de pâturage. Malgré cela, leur nombre s’amenuisa rapidement, les derniers spécimens étant recensés dans la forêt de Jaktorów en Pologne. Leurs causes d’extinction incluent la surchasse, la déforestation pour l’agriculture, ainsi que des maladies transmises par les bovidés domestiques.
La renaissance de l’aurochs par la science
Au cours des années 1920-1930, des chercheurs allemands, Lutz et Heinz Heck, ont lancé un projet de reconstruction de l’aurochs disparu. Partant du principe que les bovins modernes descendent de cet ancêtre sauvage, ils ont croisé différentes races rustiques pour tenter de le faire renaître. Dès 1938, cette version « reconstituée » de l’aurochs a été intégrée dans plusieurs parcs zoologiques européens, et en 1997, elle a été officiellement classée parmi les races bovines françaises. Toutefois, la communauté scientifique reste sceptique, estimant que cette approximation n’atteint pas entièrement l’original, notamment en raison de différences physiques telles que la robustesse et la taille des cornes.
L’aurochs, un animal ressuscité par l’innovation scientifique
Depuis le début des années 2000, des éleveurs en Europe cherchent à sélectionner les individus dont le profil génétique se rapproche le plus de celui de l’aurochs originel. Les nouvelles lignées disposent souvent de cornes très hautes et de proportions plus proches de l’original. Un séquençage du génome basé sur de l’ADN fossile vieux de plus de 7 000 ans a confirmé la proximité génétique entre ces reconstitutions et la véritable espèce disparue. Ces animaux vivent aujourd’hui en captivité, dans des réserves naturelles ou des parcs animaliers, et les scientifiques pensent que, dans quelques années, il sera peut-être possible d’obtenir des bovins parfaitement identiques à l’aurochs sauvage.
Crédit photo : GerardM