Le desman des Pyrénées est une petite créature aquatique dotée d’une longue trompe et d’une vision très limitée, ce qui lui donne une silhouette qui évoque celle d’une taupe. Cependant, leur environnement naturel ne se recoupe pas. Le rat-trompette vit principalement dans les milieux aquatiques, où il doit constamment se déplacer pour éviter que sa fourrure imperméable ne le remonte à la surface. C’est un insectivore actif durant la nuit, dissimulé durant la journée, dont la découverte a tardé à cause de sa nature discrète.
le desman des Pyrénées, un tulpidé
Connu aussi sous le nom de rat-trompette, le desman des Pyrénées, dont le nom scientifique est Galemys pyrenaicus, appartient à une famille endémique spécifique. Il fait partie de l’ordre des soricomorphes et ressemble à une petite taupe. Sa taille varie généralement entre 24 et 29 cm, la majorité de cette longueur étant consacrée à sa queue, et son poids oscille entre 50 et 60 grammes. Bien que cette espèce soit en danger d’extinction, il existe une autre espèce similaire dans le monde, qui ne partage pas le même genre : le desman russe du genre Desmana, présent dans le bassin de la Volga, de l’Oural et du Don, tandis que le desman des Pyrénées appartient au genre Galemys, propre à la région éponyme.
un nageur aguerri, le rat-trompette
Avec un pelage bi-color, gris-brun sur le dessus et argenté en dessous, le desman présente des adaptations remarquables à son mode de vie semi-aquatique : un corps fuselé avec une tête conique, de minuscules yeux et des oreilles dissimulées sous la fourrure pour limiter la résistance. Ses membres antérieurs sont petits, tournés vers l’extérieur et équipés de pattes palmées, tandis que ses jambes arrière longues lui servent de pagaies. Sa queue, recouverte d’écailles et légèrement aplatie, lui sert de gouvernail pour naviguer. De plus, ses griffes acérées lui permettent de se fixer aux surfaces rocheuses. La double couche de poils de sa fourrure, formant une isolation d’air, le protège du froid et de l’eau, complétée par une sécrétion d’une glande abdominale qui aide à maintenir cette imperméabilité.
la trompe, un organe multifonction
La tête du desman se prolonge par une trompe mobile et préhensile, d’environ 2 à 3 cm, qui ressemble à celle d’un éléphant. Résultant de la fusion de ses narines et de sa lèvre supérieure, cet appendice sensible lui permet de détecter sa nourriture grâce à ses organes tactiles et olfactifs, ainsi qu’aux vibrisses. La trompe joue un rôle crucial dans sa navigation dans l’obscurité, car il possède une vue très limitée, voire quasi inexistante. Elle l’aide également à explorer son environnement, à localiser la nourriture et à se repérer.
un espèce spécifique à son habitat
Le désman des Pyrénées est endémique à la région éponyme, où il fréquente aussi bien les zones côtières que les zones montagneuses. Il vit également dans le quart nord-ouest de la péninsule ibérique, notamment en Espagne et au Portugal. Sa préhension se concentre sur divers cours d’eau : marais, rivières, lacs naturels ou artificiels, jusqu’à une altitude de 2600 mètres. Il privilégie les eaux à débit constant ou fort, avec un fond recouvert de cailloux ou de graviers. Quand il ne chasse pas, il se réfugie dans un refuge souterrain, généralement une cavité remplie de débris végétaux, située sur des berges herbeuses ou en zones semi-ombragées.
les comportements dynamiques du desman
Alimenté principalement par des insectes aquatiques et leurs larves, le desman utilise sa trompe pour dénicher sa nourriture enfouie au fond de l’eau. Sa nécessité en énergie est forte, chaque jour il doit consommer au moins un tiers de son poids, environ 20 grammes. Il est parfaitement à l’aise dans son environnement aquatique, enchaînant plusieurs plongées successives et pouvant rester en apnée pendant une trentaine de secondes. Son activité constante, comprenant la nage, la marche, la chasse, le toilettage et les explorations, explique ses besoins caloriques importants. Le desman doit constamment bouger pour préserver la couche d’air isolante de son pelage, sinon il remonterait à la surface.
ses modes de vie discrets et nocturnes
Grâce à son pelage imperméable, il reste actif tout au long de l’année, même en hiver, à une époque où d’autres mammifères de montagne, comme la marmotte, hibernent. Toutefois, sa discrétion et son activité nocturne rendent son observation difficile. Il réside principalement dans l’eau ou dans ses abris souterrains, appelés souvent « gîtes », des cavités remplies de débris végétaux, situés au bord des rivières. La première description scientifique remonte à 1811 via l’œuvre du naturaliste français Étienne Geoffroy Saint-Hilaire, mais cette espèce reste encore largement mystérieuse pour la recherche.
fidélité et reproduction
La vie en couple est la règle chez le desman, qui reste généralement fidèle à un partenaire pour toute sa vie. La saison sexuelle du mâle s’étale de novembre à mai, celle de la femelle de janvier à juin. Les périodes de gestation culminent en février, mars et mai, bien qu’aucune saison ne soit clairement dominante pour les naissances. La femelle donne naissance à une dizaine de petits, qu’elle allaite pendant un mois, et qui atteignent leur maturité sexuelle vers l’âge de 6 mois. La solitude caractérise leur comportement hors période reproductive, et ils évitent tout regroupement, ce qui complique la mise en place de programmes de conservation ou de reproduction en captivité, en raison de leur nature très territoriale.
une situation de conservation préoccupante
La survie du rat-trompette est menacée par plusieurs facteurs : la prédation par des espèces comme la loutre, le vison ou certains chats, ainsi que par des activités humaines. La construction de barrages, les aménagements riverains, la pollution et le rejet d’eaux usées impactent considérablement son habitat naturel. La fragmentation de son territoire réduit ses chances de survie, d’autant plus qu’il est très sensible à la qualité de l’eau. Inscrite comme espèce vulnérable par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), son espérance de vie à l’état sauvage se limite généralement à deux ou trois ans. La protection de cette espèce fragile reste essentielle pour préserver sa biodiversité.
Crédit photo : David Perez