Certains d’entre vous se rappellent peut-être d’une chanson de Michel Jonasz où il invitait sa bien-aimée à s’allonger sur un tapis de fourmis rouges, comme un test symbolique de force ou d’amour. Moins poétique mais tout aussi sérieux, ces insectes sont souvent perçus avec crainte. Mais qui sont-ils vraiment, et dans quels endroits est-il probable de les croiser ?
Qu’est-ce qu’une fourmi rouge ?
Avant de parler de fourmi rouge, il est essentiel de préciser qu’il existe près de 12 000 espèces différentes à travers le globe qui portent cette appellation. En France, ce sont environ 225 espèces recensées. Parmi elles, une en particulier se distingue par sa fréquence et ses désagréments : Myrmica rubra. Surnommée la fourmi rouge d’Europe, cette espèce appartient à la même sous- famille (Myrmicinae) que la fourmi de feu, principalement présente dans le sud des États-Unis.
Son corps arbore une teinte majoritairement rouge, avec une préférence pour le rouge orangé foncé chez les ouvrières, dont la carapace est brillante et légèrement plus sombre. La taille de ces ouvrières varie entre 7 et 9 millimètres, tandis que les mâles, eux, sont noirs. Leur comportement est très hostile : elles mordent, piquent, et utilisent leur aiguille pour infliger des douleurs, mais sans danger majeur pour l’humain. Leur piqûre peut s’avérer douloureuse, mais ne constitue généralement pas une menace grave. Ces fourmis sont de véritables chasseuses actives, se nourrissant principalement de petits insectes, tout en appréciant aussi les liquides sucrés, comme les nectar de miellats.
La fourmi rouge est-elle véritablement nuisible ?
Un animal considéré comme nuisible est principalement celui dont la présence ou le comportement ont des effets négatifs sur l’activité humaine. Cependant, dans un écosystème équilibré, chaque espèce remplit une fonction essentielle. La fourmi rouge n’échappe pas à cette règle : elle participe à la régulation des populations d’insectes, en particulier dans des zones comme les Alpes, où elle contribue à éliminer plusieurs millions de kilos d’insectes forestiers nuisibles chaque année.
De plus, elles jouent un rôle dans la santé des sols : en construisant leurs galeries, elles facilitent l’aération du terrain et favorisent l’intégration de la matière organique. Ce n’est pas tout : elles collaborent aussi, parfois de façon très spécialisée, à l’élevage ou à la protection de certaines chenilles qui servent de nourriture à des papillons comme l’Azuré du serpolet ou celui des mouillères. Ces relations symbiotiques, établies depuis des décennies, sont essentielles à leur cycle de vie. La physionomie de leurs colonies est impressionnante, souvent composées de plusieurs milliers d’individus et de plusieurs reines, sans oublier leur organisation méticuleuse dans l’environnement naturel.
Que faire en cas de piqûre de Myrmica rubra ?
Une piqûre de fourmi rouge peut provoquer une sensation de brûlure intense, accompagnée d’une inflammation ou de démangeaisons qui peuvent durer plusieurs jours. Le venin, contenant des composés toxiques comme des protéines et alcaloïdes, peut parfois provoquer des réactions allergiques. Bien que rares, les risques d’œdème ou de réactions graves existent. En cas d’attaque, il est conseillé de balayer rapidement la fourmi pour l’éloigner, sans tenter de la compresser ou de la noyer, car ces gestes peuvent augmenter l’agressivité et le nombre de piqûres.
Où voit-on généralement ces fourmis ?
Présentes dans tout le territoire français, les fourmis rouges préfèrent les milieux humides et tempérés, évitant les fortes chaleurs. Elles sont souvent rencontrées dans les zones comme les Alpes ou la vallée du Rhône, nichant dans la terre, sous les pierres, dans les forêts ou nos jardins. Elles aiment fréquenter les bois humides, notamment les souches pourries ou la mousse. En milieu naturel, Myrmica rubra construit de vastes colonies regroupant plusieurs dizaines de reines. Elle privilégie les zones forestières, où ses galeries sont aménagées pour assurer une circulation d’air constante, notamment par la construction de monticules avec des ouvertures contrôlées. Dans le contexte nord-américain, cette espèce est considérée comme envahissante, notamment au Canada : ses colonies volumineuses et sa forte activité en font une menace pour les écosystèmes locaux et les activités de plein air, puisqu’elle perturbe les pique-niques et autres loisirs en extérieur.
reproduction de Myrmica rubra
Après fécondation, la reine pond des œufs qui donneront naissance à des larves, puis à des nymphes, avant de devenir ouvrières. Certaines larves survivent à l’hiver et naissent en tant que nouvelles reines au printemps. La reine contrôle la croissance de sa colonie grâce à des hormones qui inhibent le développement de certaines larves. Si une larve parvient tout de même à devenir une reine, des ouvrières peuvent la déloger en mordant ou en la blessant, empêchant ainsi la formation d’une nouvelle reine. Au fil du temps, les colonies peuvent compter jusqu’à 10 000 individus, avec la présence probable de plusieurs reines, ce qui accroît leur vigueur et leur capacité d’expansion.
Espèces ressemblantes à la fourmi rouge
Pour les non-spécialistes, la Camponote rouge (Camponotus cruentatus) peut prêter à confusion. Elle présente une coloration bicolore : le thorax et l’arrière du corps sont rouges, tandis que le reste est noir. Sa taille varie entre 6 millimètres et 1,4 centimètres, et si elle ne pique pas, sa morsure peut tout de même être désagréable. Elle niche principalement autour de la Méditerranée et peut provoquer d’importants dégâts dans les structures en creusant des galeries dans le bois, impactant ainsi les habitations.
La Formica rufa, ou fourmi rousse des bois, est également commune dans toute l’Europe. Elle présente un corps bicolore rouge-brun ou noir avec une tache sombre sur la tête et le dos. Elles construisent de larges nids en forme de dôme, souvent visibles dans les forêts ou zones dégagées. Très agressives, elles peuvent projeter un acide formique à plusieurs dizaines de centimètres.
Une autre espèce, Formica sanguinea, dont les ouvrières font entre 6 et 9 millimètres, se distingue par leur coloration rougeâtre. Elles sont remarquables par leur capacité à se faire réduire en esclavage par d’autres fourmis, notamment celles du sous-genre Serviformica. Ce comportement s’est avéré vital pour leur survie, car leur capacité à élever du couvain a été compromise au fil du temps.
Les petites fourmis jaunes, comme Lasius flavus, mesurent entre 3 et 5 millimètres. Leur teinte claire et leur nom vernaculaire de “fourmi jaune” contraste avec la coloration rouge, mais leur comportement d’évitement et leur petite taille en font des insectes à surveiller pour éviter les piqûres.