Les insectes souvent rencontrés près des zones aquatiques, notamment les libellules, figurent parmi les plus appréciés en raison de leurs magnifiques couleurs. Cependant, leur apparence frappante n’est qu’un aspect de leur vie, survenant à un moment précis de leur développement. Approfondissons leur cycle de vie pour mieux comprendre leur fascinating parcours.
Que peut-on entendre par “libellule” ?
Il est important de préciser que, d’un point de vue scientifique, les libellules appartiennent à un groupe d’insectes appelés Odonates, qui se répartissent en deux sous-catégories distinctes :
- Les Zygoptères, souvent désignés comme “demoiselles”, caractérisées par la manière dont elles replient leurs ailes au repos, positionnées au-dessus de leur corps.
- Les Anisoptères, communément appelés “grandes libellules”, qui, lorsqu’elles sont à l’arrêt, maintiennent leurs ailes largement étendues sur les côtés.
Dans le langage commun, cette distinction s’efface généralement, car on utilise le terme “libellule” pour désigner indifféremment ces deux groupes. Leur cycle de vie se déploie en deux phases principales : une partie à la surface de l’eau, puis une autre dans l’air.
Au-delà de leur attrait esthétique, il est peu connu que ces insectes existent depuis plus de 200 millions d’années, arborant une anatomie remarquablement semblable à celle que nous connaissons aujourd’hui. Elles ont coexisté avec les dinosaures, sont apparues lorsque les premiers oiseaux sont nés, et ont été présentes lors de l’essor des premiers primates. Leur répartition est très large, sauf dans les régions polaires. À l’échelle mondiale, plus de 6000 espèces de libellules ont été recensées, avec environ 130 en Europe centrale et une cinquantaine en France métropolitaine.
Une grande partie de leur vie s’écoule dans l’eau
Le processus de transformation d’un œuf en libellule adulte comporte une succession de jusqu’à quinze étapes distinctes. La vie débute dans un environnement aquatique, avec des adaptations variées selon le type de point d’eau. Par exemple, dans des milieux stagnants comme les étangs ou les marais, on trouve souvent des Orthétrum. Dans des rivières à faible courant, ce sont généralement des gomphes qui se développent. Les petits ruisseaux, quant à eux, accueillent des Agrions de Mercure, tandis que les tourbières abritent des Cordulies arctiques, et les mares de jardin, des Aeschnes bleues.
La majorité de leur existence se déroule dans l’eau, souvent plusieurs années pour certaines espèces, contre quelques semaines pour d’autres. Leurs œufs peuvent être pondus directement à la surface de l’eau ou déposés sur des terrains secs qui seront submergés plus tard. Résistants à des conditions extrêmes telles que le froid ou la pollution, ils peuvent aussi être dispersés lors de lâchers d’œufs depuis la vole de la femelle, ou déposés directement à la surface de l’eau, voire insérés dans des végétaux ou de la mousse morte.
Les œufs, généralement d’environ un millimètre de hauteur, constituent le début de leur développement. Vers la fin du printemps ou au début de l’été, la larve émerge de l’œuf, mesurant alors environ 3 mm, et ressemble à un petit poisson. La véritable phase larvaire commence alors, avec une morphology distincte selon la sous-famille :
- Une tête peu mobile ornée d’antennes pouvant servir à identifier l’espèce,
- Des yeux permettant une vision panoramique,
- Un masque ou labium, un organe spécialisé pour la capture de proies, parfois appelé “bras mentonnier”,
- Un thorax avec trois paires de pattes et des ailes en développement,
- Un abdomen robuste composé de 10 segments, se terminant par une pyramide anale.
Chez les Zygoptères, le corps est plus élancé et possède trois lamelles en forme de plumes à la place de la pyramide anale, tout en conservant un masque spécifique. La mobilité des larves est généralement lente à la marche, mais elles peuvent brutalement projeter de l’eau à l’aide de leur ampoule rectale pour accélérer leur déplacement.
Considérée comme une redoutable carnassière, la larve de libellule chasse un large éventail de proies, des petits invertébrés aquatiques aux crustacés, en passant par ses congénères plus petits, les larves de batraciens, voire de jeunes poissons. Elle se dissimule dans le substrat, attendant patiemment que la proie passe à proximité avant de s’en saisir.
La vie en vol des libellules adultes
Après la phase larvaire, les libellules entrent dans une étape de métamorphose appelée “mue nymphale”, suivie d’une dernière mue dite “imago”. Lors de cette transformation, la larve sort de l’eau en changeant d’enveloppe, la tête gonfle, les ailes commencent à se déployer dans leur fourreaut alaires, tandis que le masque s’efface et que les yeux prennent de l’ampleur. Il est possible, en observant attentivement la végétation proche des sites de naissance des larves, de retrouver des vestiges de ces exuvies, témoins de leur passage dans cette phase.
Une fois sortie de l’eau, la libellule vole de ses propres ailes pour atteindre la maturité sexuelle, généralement entre juin et octobre. La durée de vie chez l’adulte varie de quelques semaines à plusieurs mois, selon les espèces. Par exemple, le Sympetrum strié ou le Calopteryx éclatant peuvent vivre plus de six mois, ce qui leur permet de prolonger leur période de reproduction.
Les adultes, tout comme leurs jeunes versions, sont également de voraces carnivores. Ils se nourrissent notamment de mouches, moustiques, sauterelles, papillons, et parfois même d’autres libellules. Parmi leurs prédateurs naturels, on trouve notamment certains oiseaux insectivores, comme le gobe-mouche gris, ou encore des araignées orbitèles qui tissent leurs toiles pour les capturer.