La scutigère aime profiter de la chaleur présente dans nos maisons et il n’est pas rare de la voir sortir de ses cachettes pour chercher une source de nourriture et un abri. Sa couleur beige, combinée à ses longues pattes, lui donne une apparence peu engageante. Pourtant, malgré son allure un peu repoussante, ce centipède joue un rôle bénéfique dans notre environnement intérieur.
La scutigère, qui peut atteindre 40 cm par seconde !
Appelé aussi « mille-pattes de maison », ce spécimen appartient à la famille des chilopodes, un groupe comprenant près de 3 500 espèces différentes et faisant partie des myriapodes. Son nom scientifique, Scutigera coleoptrata, provient du latin « scutum » (bouclier) et « gerere » (porter), en référence à la structure segmentée de son corps. Rapide et efficace, ce centipède peut atteindre une vitesse impressionnante d’environ 40 cm par seconde durant sa chasse. À l’âge adulte, il peut mesurer jusqu’à 10 cm en incluant ses pattes.
Un mille-pattes à trente pattes, mais pas mille
Bien qu’il soit couramment désigné comme un mille-pattes, la scutigère possède en réalité 14 paires de pattes fines et effilées, qui peuvent se régénérer après une perte ou une blessure lors des mues, grâce à une autotomie. Les pattes situées à l’arrière du corps sont plus longues que celles à l’avant, ce qui lui confère une grande agilité et facilité à se déplacer rapidement. Sa tête est également équipée de deux longues antennes, essentielles à la détection de ses proies, mais qui ne jouent pas de rôle dans la locomotion. La paire de forcipules, située près de la tête, est spécialisée dans la capture et la subjugation de ses victimes.
Un corps rayé et segmenté
Son corps, divisé en segments, est protégé par un exosquelette de chitine compartimenté en neuf plaques ressemblant à des petits boucliers, véritables références à son nom scientifique. La teinte beige à jaunâtre de la face dorsal est marquée par trois rayures longitudinales violacées, tandis que la face ventrale tire sur le blanc. Ses pattes présentent une alternance d’anneaux sombres et clairs. Dotée d’un système sensoriel performant — comprenant l’ouïe, l’odorat et la vue —, la scutigère est adaptée pour détecter rapidement tout danger ou source de nourriture.
La scutigère, une espèce présente à l’échelle planétaire
Répandue à travers le monde, cette myriapode est particulièrement abondante dans les régions chaudes, notamment celles de type méditerranéen, d’où elle tire ses origines, mais elle a aussi migré vers le Nord. Introduite dans de nombreuses régions du globe via le commerce maritime, elle a trouvé des habitats dans des zones aussi diverses que l’Europe, l’Asie ou l’Amérique du Nord. La seule espèce de scutigère recensée en France évolue jusqu’en altitude moyenne, approchant 1100 mètres.
Un climat chaud et sec, un vrai défi pour la scutigère
Cette espèce respire à l’aide de pores ouverts sur son corps, ce qui la rend vulnérable à la déshydratation si elle est exposée à des conditions de chaleur excessive ou à un air trop sec. Elle préfère donc des environnements où la température et l’humidité restent modérées, comme les endroits ombragés et humides, tels que les sous-sols, les cavités sous les pierres ou les galeries souterraines. En intérieur, elle privilégie la salle de bains, la chaufferie ou la cave, évitant la lumière directe, car elle est très sensible à la luminosité et partira rapidement si on l’éclaire. Elle ne construit ni nid ni toile.
Son menu : les petites bêtes qu’elle trouve
La scutigère se nourrit essentiellement d’un éventail d’insectes et d’autres invertébrés : mouches, mites, cloportes, fourmis, punaises de lit, araignées, guêpes, moustiques, grillons, poissons d’argent, blattes, larves diverses, et même certains autres centipèdes. Sa présence dans une maison indique donc qu’elle se sert sur place comme source de nourriture.
Un venin efficace mais inoffensif pour l’homme
La nuit tombée, cette créature devient une chasseuse vorace, utilisant ses longues pattes pour se déplacer rapidement vers ses proies. Elle immobilise ses victimes grâce à ses crochets, appelés forcipules, dans lesquels elle injecte un venin paralysant. La victime, une fois anesthésiée, est emmenée à sa mandibule pour être dévorée. Il est rare que la scutigère attaque l’homme, sauf si elle se sent menacée dans ses manipulations. La morsure peut être douloureuse mais n’est généralement pas toxique, étant inoffensive dans la majorité des cas. Il reste donc conseillé de la laisser tranquille.
La danse de la reproduction
Lors de la saison des amours en printemps et en été, les deux partenaires échangent des signaux par le toucher de leurs antennes, puis tournent autour l’un de l’autre dans une sorte de rituel. Le mâle dépose un spermatophore, un petit paquet mince, sur le sol, que la femelle recueille ensuite avec ses organes reproducteurs pour provoquer la fécondation. Elle peut ensuite pondre entre 130 et 290 œufs, déposés un à un sur le sol. Les jeunes naissent avec peu de pattes, qui se développent au fil de six mues successives. Après cette étape, ils passent encore par quatre autres mues pour atteindre leur maturité complète. La durée de vie de cette espèce varie entre 3 et 7 ans.
Un insecte peu élégant mais bénévole dans nos maisons
Contrairement à certaines espèces nuisibles comme les termites ou les abeilles charpentières, la scutigère ne cause pas de dégâts dans une habitation. Elle ne construit pas de nids ni de toiles, ne mord pas (sauf si on l’embête) et préfère simplement chercher un lieu sombre pour se cacher, tout en se nourrissant d’autres petits invertébrés. Son rôle bénévole consiste à être un agent de lutte contre les parasites et autres insectes indésirables dans nos foyers. Si sa présence vous dérange, il est conseillé de la capturer délicatement à l’aide d’un récipient et de la relâcher dans un endroit plus discret, comme une cave.
Crédit photo : Didier Descouens