La libellule se démarque par sa capacité à faire mouvoir ses quatre ailes de manière totalement indépendante, ce qui en fait un maître incontesté de la voltige aérienne. Son ballet aérien, notamment lors de la saison des amours, illustre parfaitement cette habileté. Cet insecte possède également une versatilité étonnante, étant aussi à l’aise dans l’eau que dans les airs, rappelant la précision d’un petit hélicoptère moderne.
Profil détaillé de la libellule
Présentes depuis environ 200 millions d’années sur la planète, les libellules appartiennent à la grande famille des Odonates, subdivisée en deux branches principales :
- Les Zygoptères, aussi appelés Demoiselles ;
- Les Anisoptères.
Quelles distinctions entre ces deux groupes ? Les Demoiselles sont généralement plus petites et se reconnaissent par leurs ailes repliées lorsqu’elles se posent. Elles sont aussi caractérisées par leurs ailes plus petites. En revanche, les Anisoptères, plus imposants, exhibent des couleurs souvent contrastées selon leur espèce et maintiennent leurs ailes toujours déployées, même au repos. Aujourd’hui, plus de 5000 variétés ont été recensées à l’échelle mondiale, incluant environ 2800 espèces d’Anisoptères. En France métropolitaine, on en compte une soixantaine, notamment l’Anax empereur, la libellule déprimée, la libellule écarlate, le Sympetrum rouge-sang, la libellule à quatre taches, l’Orthetrum réticulé, le Calopteryx splendide ou encore l’Aeschne bleue.
Ailes translucides et regard globulaire
Ce petit insecte doté d’un corps allongé est constitué de dix segments bien distincts, protégés par une carapace externe robuste. Il possède trois paires de pattes et deux paires d’ailes fines, transparentes, exhibant un réseau nerveux complexe, qui restent constamment ouvertes, même lorsqu’il ne vole pas. La tête ronde de la libellule est équipée de deux yeux composés, volumineux et multifacétés, ainsi que de courtes antennes et de mandibules puissantes pour broyer sa nourriture. La palette chromatique des libellules est large : du noir brillant au vert en passant par le bleu, chaque espèce exhibe ses teintes caractéristiques. La taille varie aussi, allant jusqu’à 7 cm de long, avec une envergure pouvant atteindre 11 cm.
L’eau, le refuge vital de la libellule
Les libellules sont présentes sur la majorité des continents, à l’exception des zones polaires inadaptées à leur sang-froid. Leur cycle de vie est étroitement lié à la présence de plans d’eau calme, en lesquels elles déposent leurs œufs. Parmi les habitats favorables, on trouve notamment :
- Les eaux stagnantes telles que les lacs, étangs, marais, tourbières ou mares naturelles ou de jardin ;
- Les petits cours d’eau à faible débit, comme rivières, ruisseaux ou canaux ;
- Les sources dans les forêts ou sous-bois ;
- Les prairies inondables ou zones inondées.
Chasseuse de moustiques et autres insectes
Une libellule peut ingérer jusqu’à une centaine d’insectes par jour, qu’il s’agisse de larves ou d’adultes. Son menu inclut des moustiques, des papillons, des araignées, des têtards, des mouches, des vers de vase, ainsi que des éphémères ou des trichoptères. Sa performance aérienne en fait une prédatrice redoutable : elle peut atteindre une vitesse de 90 km/h, changer de direction soudainement, effectuer une marche arrière ou même rester immobile en vol. Deux stratégies principales régissent sa chasse : la première consiste à attendre furtivement perchée sur une plante pour saisir une proie qui passe à portée, la deuxième à capturer ses cibles en plein vol.
Transfer d’amour et comportement territorial
Les mâles libellules cherchent activement à défendre leur espace de reproduction, n’hésitant pas à poursuivre tout rival qui pénètre sur leur territoire. Lors de la saison amoureuse, ces insectes abandonnent leur solitude pour s’accoupler, souvent en tandem dans un vol gracieux. La ponte peut alors intervenir, avec la déposi
tion jusqu’à 600 œufs à la surface de l’eau ou dans la végétation aquatique. Après quelques jours ou semaines, en fonction des espèces, les œufs éclosent pour donner naissance à des larves.
La larve : un cycle de vie prolongé
Chez les Anisoptères, le développement suit plusieurs phases successives :
- Le stade embryonnaire se transforme en prolarve, puis en larve, qui sort de l’œuf ; cette étape dure de quelques secondes à quelques heures ;
- Dans leur environnement aquatique, les larves se nourrissent de zooplancton, d’organismes microscopiques comme les infusoires, de larves d’insectes, voire de petits poissons ; elles représentent la phase la plus longue de leur existence, pouvant durer de un à plusieurs ans ;
- La croissance s’accompagne de mues successives, jusqu’à une quinzaine, nécessaires pour renouveler leur squelette externe rigide ;
- Enfin, à l’issue de cette période, la libellule atteint l’état adulte, ou imago, qui lui confère une longévité variable, généralement de quelques semaines à plusieurs mois, avant de mourir généralement à l’automne.
Espèces en danger dans la nature
Selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), une dizaine d’espèces de libellules présentes en France sont aujourd’hui menacées d’extinction. Outre ces quinze espèces, treize autres sont considérées comme quasi-menacées, telles que la Déesse Précieuse, la Cordulie splendide ou l’Agrion bleuissant. Les principales causes de ce déclin sont la destruction de leur habitat naturel liée à l’urbanisation et aux aménagements aquatiques, ainsi que la pollution de leurs zones de reproduction.
La libellule, alliée du jardinier
En plus d’être un insecte fascinant, la libellule joue un rôle précieux dans la gestion des populations d’insectes nuisibles, similaires à celui de la coccinelle ou de certains oiseaux. Elle contribue notamment à réduire la présence de moustiques. Pour favoriser leur développement dans un jardin, il est conseillé de créer un espace aquatique en y aménageant une mare ou un bassin peu profond, entouré de végétation comme des nénuphars, des reed et autres joncs. La plantation de plantes attractives telles que l’achillée millefeuille, l’échinacée, la sauge ou le syngonium peut aussi aider à attirer ces insectes bénéfiques. Quelques gestes simples permettent ainsi d’encourager leur présence et de préserver cette créature naturelle inoffensive.