Le crabe de cocotier : un crustacé majestueux et unique

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Lorsqu’on évoque les cocotiers, l’image qui revient souvent est celle de plages ensoleillées et d’une vie de rêve. Cependant, derrière ces paysages idylliques se cachent des créatures fascinantes, parfois étonnantes ou impressionnantes, qui habitent ces environnements. Parmi elles, un crustacé hors du commun attire l’attention par ses caractéristiques uniques : le Crabe de cocotier.

Le Crabe de cocotier : un crustacé à part

Originaire des îles situées dans l’océan Indien et le Pacifique, ce crustacé porte un nom scientifique qui peut prêter à confusion : Birgus latro. Le terme « latro »—signifiant « voleur »—fait référence à ses habitudes de dérobade, notamment lorsqu’il s’introduit dans les habitations pour dénicher de la nourriture. Son nom « birgus » a été inventé de toutes pièces par Leach en 1815, sans lien avec une racine étymologique précise.

Malgré son nom vernaculaire, le Crabe de cocotier ne doit pas être confondu avec un vrai crabe. Si c’est un crustacé, il appartient en réalité à la famille des Bernard-l’ermite (Pagures), qui partage de nombreuses caractéristiques avec les crabes de la famille des Brachyures. La différence notable réside dans la présence ou non d’une carapace dure : tandis que les crabes ont une carapace robuste, les pagures utilisent souvent une coquille de gastéropode ou d’autres matériaux pour protéger leur corps mou.

Chez le Crabe de cocotier, cette distinction est encore plus marquée : adulte, il ne porte plus de carapace protectrice. Seuls les jeunes crabes utilisent des coquilles pour se couvrir. Lorsqu’il atteint l’âge adulte, il durcit son abdomen en sécrétant une couche de chitine, une substance présente aussi chez les insectes, araignées et autres crustacés, qui lui confère une protection renforcée. La vie quotidienne du Crabe de cocotier se déroule généralement à l’abri dans un trou ou perché en haut d’un arbre, où il reste inactif pendant la journée. La nuit, il sort pour chercher sa nourriture, évitant ainsi ses prédateurs tout en limitant la déshydratation. Sa longévité peut atteindre 40 à 60 ans, voire un siècle pour certains individus.

Les proportions impressionnantes du Crabe de cocotier

Ce crustacé peut atteindre un poids conséquent, jusqu’à 4 kg à l’âge adulte, et parfois même 15 kg dans des cas exceptionnels. La taille de ses membres lui permet d’étirer une envergure pouvant dépasser un mètre, tandis que son corps atteint environ 40 cm de longueur. Sa coloration varie du violet au rouge orangé, en passant par différentes nuances brunes, lui donnant un aspect spectaculaire.

Bien qu’il soit massif, il ne détient pas le record du plus grand crustacé du monde : ce titre revient à une araignée de mer japonaise, Macrocheira kaempferi, dont la portée atteint environ 4 mètres. Cependant, cette dernière est plus rare à observer, car elle évolue à une profondeur de 300 mètres sous la mer.

Une puissance redoutable face à ses ennemis

Les pinces du Crabe de cocotier sont capables d’un réel exploit : casser des noix de coco. Leur force est proportionnelle à leur taille, un crabe de 4 kg pouvant exercer une pression de 3 300 Newtons. Pour situer, la mâchoire humaine génère environ 1 000 Newtons, tandis qu’un grand crocodile marin peut dépasser les 16 000 Newtons. La force exercée ne diffère pas selon le sexe, à poids égal.

Ce crustacé s’attaque souvent à des fruits riches en lipides, comme les noix de coco, qu’il grimpe à la recherche de ces trésors. Une fois en haut du palmier, il les fait tomber. Si la coquille ne se brise pas à la chute, il redescend et passe un certain temps à tenter de l’ouvrir, utilisant ses pinces pour déchirer la coque et atteindre la pulpe nourrissante.

Mais sa diète n’est pas limitée aux fruits : volontairement ou par curiosité, il peut également fouiller dans les déchets humains ou s’intéresser à tout ce qui est comestible. Omnivore, il peut consommer des graines, d’autres crustacés, des tortues, des rats, des oiseaux ou même des charognes. Il grimpe parfois dans les arbres pour attraper des oiseaux en repos ou briser une aile de ces derniers, puis revient à son poste pour se rassasier. Lorsqu’il trouve une occasion, d’autres crabes peuvent lui prêter main-forte, attirés par la nourriture facile.

Reproduction : un cycle saisonnier et spectaculaire

La période de reproduction du Crabe de cocotier se déroule principalement entre mai et septembre. Les autres mois, ils vivent de façon solitaire, et les rencontres peuvent rapidement dégénérer en combats violents. Lorsque mâles et femelles se croisent, ces confrontations sont aussi intenses, notamment lors de la période de reproduction. Le mâle, dominant, retourne la femelle pour l’accoupler, un processus qui dure environ un quart d’heure.
Après fécondation, la femelle dépose entre 50 000 et 150 000 œufs, qu’elle porte dans la partie inférieure de son abdomen pendant environ un mois avant de les libérer dans la mer. Les œufs donnent naissance à des larves, appelées zoés, qui flottent en surface durant 3 à 4 semaines. La majorité des larves ne survivront pas jusqu’à la terre ferme, une chance sur mille seulement parvenant à atteindre la côte.

Une fois arrivée à maturité, le jeune crabe doit rapidement chercher une coquille pour se protéger. La croissance est très rapide la première année, avec trois mues successives au cours desquelles il change de coquille. C’est donc à environ un an que le crustacé devient suffisamment dur pour quitter sa protection et commencer sa vie terrestre. Il s’installe alors sur la côte, dans des zones herbeuses ou rocheuses.

À l’âge de trois ans, il quitte la mer pour s’établir en forêt, souvent dans des terriers qu’il creuse ou dans ceux déjà existants, sous les racines d’arbres. La mue n’a lieu qu’une seule fois par an, dans une chambre de mue creusée dans un sol meuble, à environ 50 cm de profondeur.

Une adaptation étonnante pour la vie terrestre

Ce crustacé a développé un système respiratoire particulier en évoluant du marin au terrestre : ses poumons branchiostégaux sont un hybride entre des poumons et des branchies. Leur structure, semblable à une branchie, est adaptée pour capter l’oxygène de l’air, permettant au Crabe de cocotier de survivre sur la terre ferme. Toutefois, il doit maintenir son corps humide avec ses pattes postérieures, car il ne peut nager une fois adulte, son système respiratoire n’étant plus compatible avec l’eau.

Ce mode de vie terrestre a aussi influencé ses sens, en particulier son odorat. Ses organes olfactifs, très développés, ressemblent davantage à ceux des insectes qu’à ceux des autres crustacés, lui permettant de repérer sa nourriture ou ses partenaires à distance.

Le Crabe de cocotier : un mets limité…

Ce crustacé est consommé dans certaines cultures, sa préparation étant comparable à celle de la langouste, que ce soit bouilli ou cuit à la vapeur. Traditionnellement apprécié dans les îles polynésiennes, ses parties comestibles peuvent cependant être à risque. En 2008, plusieurs cas d’intoxication mortelle ont été enregistrés après ingestion du tube digestif, semble-t-il parce que certains crabes peuvent se nourrir de végétaux toxiques, comme les amandes de Hotureva (Cerbera manghas), qui contiennent une toxine pouvant provoquer un arrêt cardiaque. Il est donc impératif d’être prudent lors de leur consommation.

De plus, face à une population de Crabes de cocotier en déclin, des mesures de protection ont été instaurées pour limiter leur prélèvement, ce qui réduit d’autant les chances d’en croiser dans la nature.

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