La squille ou crevette-mante religieuse, un crustacé exceptionnel

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La squille, aussi appelée crevette-mante religieuse, est une créature marine remarquable par plusieurs de ses caractéristiques. Classée parmi les crustacés parmi les plus vifs en termes de coloration, cette espèce possède la capacité de percevoir une large gamme de couleurs, une particularité rare chez les animaux. De plus, ses pattes de chasse peuvent frapper à une vitesse comparable à celle d’un coup de feu, faisant d’elle un prédateur redoutable dans les eaux chaudes où elle vit.

La squille : crevette ou mante religieuse ?

Malgré ses surnoms, la squille (Odontodactylus scyllarus) n’appartient ni à la famille des crevettes ni à celle des mantes religieuses. Elle fait partie des stomatopodes, un groupe distinct des décapodes comme la crevette, et appartient à la famille des odontodactylidae. Sa dénomination populaire est due à ses deux pattes ravisseuses qui rappellent celles de la mante religieuse. Avec plus de 400 espèces connues, cette créature aquatique évolue depuis plus de 400 millions d’années, la plus grande étant la squille zébrée, pouvant atteindre 40 cm de longueur.

Habitat et localisation de la squille

Ce crustacé privilégie les eaux chaudes du bassin indo-pacifique, allant de Guam jusqu’aux côtes africaines, en passant par le Japon et l’Australie. Il construit ou dérobe des terriers à plusieurs accès, souvent dans des récifs, des zones rocheuses ou des fonds sableux. La squille évolue généralement en eaux peu profondes, à des profondeurs allant jusqu’à 65 mètres, se déplaçant avec agilité entre ces différents habitats.

Son apparence physique

Ressemblant davantage à une langouste qu’à une crevette classique ou une mante religieuse, la squille est dotée d’un corps robuste et long, protégé par une carapace épaisse composée de plaques qui recouvrent principalement la tête et la partie antérieure du thorax. Sa queue, ou telson, peut s’ouvrir en éventail pour faciliter la nage. Elle se distingue aussi par ses grandes antennes terminées par trois fouets, ainsi que par ses deux pinces caractéristiques, qui évoquent les pattes repliées de la mante religieuse.

Les couleurs de la squille

Les différentes espèces de crevettes-mantes affichent une palette variée, allant du brun aux teintes les plus vives. La squille la plus spectaculaire est la squille multicolore, souvent appelée crevette-mante pan, qui peut présenter des teintes allant du rouge-orange chez les jeunes, au vert ou bleu chez les mâles, et à des nuances d’olivâtre et de brun chez les femelles. Son abdomen arbore un bleu vif au niveau du pédoncule oculaire, tandis que ses pattes sont ornées de taches noires et orangées, faisant d’elle l’un des crustacés les plus colorés au monde.

Les fonctions de ses pattes

Sa paire de pattes ravisseuses est complétée par trois autres paires de pattes pseudo-ravisseuses, qui lui servent à différentes tâches, comme la capture de proies, le creusement de terriers ou le nettoyage du corps. Son thorax comprend trois paires de pattes de déplacement, appelées péréiopodes, tandis que son abdomen porte à la fois des pattes pour la marche et des pattes nageuses, ou pléopodes, équipées de branchies. Lorsqu’elle chasse, la squille dégoupille ses pinces à grande vitesse pour attraper ou mutiler ses proies, leur morphologie étant adaptée à deux principales stratégies :

  • Les frappeurs, ou smashers, possèdent une masse à l’extrémité de leurs pinces, capable de briser coquilles et carapaces grâce à une force colossale ;
  • Les harponneurs, ou spearers, ont des pinces plus fines équipées d’éperons pour transpercer leurs cibles.

Force et rapidité de frappe

Les squilles, qu’elles soient frappeuses ou harponneuses, se distinguent par leur vitesse de frappe impressionnante, pouvant atteindre en moyenne 80 km/h, et grimper jusqu’à 110 km/h chez les plus rapides. La puissance de leur coup est si grande qu’elle engendre la formation de bulles de vapeur par cavitation, produisant une onde de choc capable d’étourdir ou de tuer une proie. La force de leur frappe est telle qu’elle peut même briser des vitres d’aquarium ou des masques de plongée, illustrant leur capacité exceptionnelle en matière de prédation.

Une vision d’une complexité rare

Ce crustacé possède l’un des systèmes visuels les plus avancés du règne animal. Ses yeux volumineux, situés sur des pédoncules mobiles, peuvent tourner indépendamment, offrant une vision panoramique à 360°. Chaque œil se compose de trois pseudo-pupilles indépendantes, équipées de nombreux photorécepteurs, permettant à la squille de percevoir de milliers de couleurs, y compris dans le spectre ultraviolet, infrarouge et la lumière polarisée. Cette perception multispectrale lui confère une capacité de détection hors norme dans son environnement.

Son alimentation

En tant que l’un des prédateurs majeurs dans ses zones d’habitat, la squille chasse principalement durant la journée. Son régime se compose essentiellement de crustacés, mollusques, vers marins et petits poissons. Grâce à ses puissantes pinces, elle peut casser les coquilles de ses proies pour accéder à leur chair, ce qui en fait un chasseur efficace dans les eaux chaudes et peu profondes.

Son mode de reproduction

Les organes reproducteurs de cette espèce sont doubles, avec deux pénis pour le mâle et deux gonopores pour la femelle, qui peut stocker le sperme durant plusieurs semaines. La ponte donne lieu à des centaines d’œufs rose, maintenus contre le thorax par la femelle à l’aide de ses pattes maxillipèdes et d’un mucus adhésif. Pendant une période de 2 à 3 mois, la femelle ne peut pas se nourrir ni chasser, car elle doit protéger ses œufs. Le mâle reste à proximité, garantissant la fécondation et la survie des jeunes.

Les jeunes : de l’éclosion à la maturité

À leur sortie de l’œuf, les jeunes squilles adoptent un mode de vie pélagique, dérivant au gré des courants marins. Environ neuf jours après l’éclosion, ils disposent déjà de pattes ravisseuses capables d’un coup puissant. Certaines espèces, comme la Gonodactylaceus falcatus des Philippines, sont suffisamment développées pour frapper avec la même vitesse que les adultes. Lorsqu’ils atteignent le fond marin, ils poursuivent leur croissance en muant toutes les six semaines, atteignant la maturité sexuelle à une taille comprise entre 8 et 10 cm, ce qui leur permet de s’engager dans la reproduction pour perpétuer l’espèce.

Crédit photo : Silke Baron