Que signifie l’expression ‘Faire une vacherie’ et d’où vient-elle ?

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Exprimer une mauvaise intention à l’encontre de quelqu’un peut se manifester par une petite manœuvre sournoise, souvent à destination de le piéger ou de le déstabiliser. Nous allons explorer les origines de cette expression, son lien avec la figure de la vache, et son évolution depuis l’époque du XIXe siècle, lorsque ce terme était principalement utilisé dans le contexte agricole avant de s’étendre à un langage plus figuré et populaire.

Que désigne concrètement l’expression “faire une vacherie” ?

Utilisée dans différents contextes, cette expression comporte une nuance négative. Elle peut signifier agir avec dureté ou sévérité, orchestrer une action malveillante ou manipuler une situation de manière rusée ou déloyale. Des tournures proches telles que “jouer un mauvais tour”, “tenter un coup bas” ou “mettre en place une ruse sournoise” illustrent cette idée. Parmi les exemples classiques d’emploi, on trouve :

  • “Ne t’inquiète pas si certains te font des vacheries, je suis là pour intervenir et défendre tes intérêts.” (Référence littéraire datant de 1922). À noter que l’expression “faire le serre” était autrefois une façon de parler de donner le signal pour agir.
  • “Si tu étais malade ou si tu me faisais des vacheries, je pourrais perdre patience.” (Extrait d’un ouvrage de 1943) ;
  • “Ce fut une confrontation difficile, chacun s’est montré rusé et a tenté de jouer des tours, sans qu’aucun ne sorte vainqueur malgré toutes les tentatives et manœuvres sournoises.” (1959).

Que recouvre la notion de vacherie au sens figuré ?

Au-delà de l’expression, le mot “vacherie” désigne généralement une conduite malhonnête, rusée ou perfide, voire une tromperie caractérisée. Il évoque également une marchandise de mauvaise qualité ou une situation désagréable. Par exemple, on peut parler d’une “vacherie” dans le cadre d’un produit défectueux ou d’un moment pénible. Illustrations :

  • “Ce sera encore une vacherie à gérer, il va falloir s’en occuper rapidement.” (Référence datant de 1916) ;
  • “Je n’arrive pas à croire la vacherie que Levelan a débitée en me racontant ses histoires.” (1934) ;
  • “Ce commentaire était d’une vacherie incroyable, comme une vraie coupure dans le moral.” (1946) ;
  • “C’était une vie pleine de vacheries, mais on s’accrochait quand même.” (1969).

Mais la vacherie peut aussi désigner quelque chose de tangible et physique : la partie de la ferme où l’on garde et traite les vaches. Son usage a diminué avec l’emploi du terme “étable” qui s’est répandu dans le langage courant. Voici quelques citations anciennes évoquant cette acception :

“Les bâtiments de la ferme étaient situés sous un ciel pâle, avec la vacherie, la bergerie, les granges et l’habitation disposés autour d’une cour carrée.” (Émile Zola, 1887) ; “J’ai vu moi-même la traite dans la vacherie de notre ferme marché des Enfants-Rouges.” (Honoré de Balzac, 1833). La vacherie désignait aussi la totalité du cheptel de vaches appartenant à une exploitation, comme en témoigne cet extrait : “Elle prenait soin de ses animaux, notamment de la vacherie.” (Émile Zola, 1899).

D’où vient cette expression “faire une vacherie” ?

Elle tire ses racines de la réputation imprévisible de la vache, animal souvent considéré comme bordélique ou caractériel. Si le bovin est en apparence calme alors qu’il paît paisiblement, il peut soudainement se montrer agressif en décochant un coup de sabot sans avertissement. Ce comportement inattendu, combiné à la tendance de l’animal à dissimuler ses intentions, a nourri des métaphores évoquant la méchanceté, la ruse ou la sévérité. Dès le XIXe siècle, des expressions telles que “peau de vache”, “vachard” ou “c’est vache !” se sont popularisées pour qualifier des actes malveillants ou des coups durs, parfois liés à une certaine brutalité dans les relations. La formule “faire une vacherie” évoque donc cette idée d’un comportement maladroit ou méchant, à l’image d’une vache au tempérament souvent capricieux ou imprévisible.

Quand est apparue l’expression “faire une vacherie” ?

Les premières mentions du terme “vacherie” avec une connotation figurée remontent à la seconde moitié du XIXe siècle. En 1867, dans le “Dictionnaire de la langue verte” d’Alfred Delvau, il est question de “nonchalance” ou “d’avachissement” pour la vacherie. En 1872, le lexicographe Lorédan Larchey évoque une “façon d’agir de manière animale”. Plus tard, Émile Chautard cite la formule “faire une vacherie” dans le sens de “commettre une méchanceté” vers 1885. Enfin, dans son “Dictionnaire d’argot” publié en 1894, Charles Virmaître la qualifie de “saletés” ou “trahisons” accomplies à l’encontre d’autrui.

Faut-il faire ou dire des vacheries ?

Depuis son apparition, cette expression a inspiré de nombreux écrivains et dramaturges. Qu’il s’agisse de préparer une manœuvre, de lancer une remarque, ou simplement de s’amuser à provoquer l’autre, l’idée reste celle de jouer ou de dire des choses désagréables ou rusées. Quelques exemples illustratifs :

  • “Je suis conscient qu’il écoute, mais il n’a pas besoin de répondre, sauf s’il veut balancer une vacherie.” (Giono, 1951) ;
  • “Les relations avec certains personnages sont compliquées, surtout quand ils se complaisent à concocter des coups rusés et des vacheries.” (Jean Hougron, 1954) ;
  • “Ils passaient des heures à se défier de vacheries et à échanger des propos mordants.” (Nancy Bosson, 1990) ;
  • “Je ne pouvais pas imaginer qu’il avait en tête une telle vacherie, ça m’a pris au dépourvu.” (Raphaël Caddy, 2012).