La nature rassemble des phénomènes complexes que l’intelligence humaine ne peut toujours saisir pleinement. Elle engendre des formes de vie parfois surprenantes, voire extravagant. Cependant, notre curiosité nous pousse à vouloir comprendre ces êtres, notamment pourquoi certains oiseaux cessent de voler. Notre dossier explore en profondeur les principales raisons qui expliquent cette évolution.
La présence inexistante de prédateurs
Une des causes majeures de la perte du vol chez certaines espèces remonte à une évolution progressive sur de longues périodes. Pour plusieurs oiseaux, voler n’est plus une nécessité vitale ni pour leur reproduction, ni pour leur survie.
Ce phénomène est souvent observé chez des oiseaux vivant dans des régions insulaires où les prédateurs naturels sont rares voire absents. Ces populations ont pu économiser leur énergie, se concentrant sur d’autres comportements essentiels comme l’alimentation ou la reproduction. Cependant, cette indépendance relative peut les rendre vulnérables lors de changements environnementaux, qui finissent parfois par survenir.
Le dodo, emblématique de cette dynamique, illustre parfaitement ce processus. Originaire de l’île Maurice, cet oiseau ne pouvait plus voler à cause de ses ailes devenues trop petites par rapport à son corps massif. Faute de prédateurs, il n’avait pas besoin de cette capacité pour survivre, se nourrissant essentiellement de fruits tombés. L’arrivée des humains sur l’île, accompagnée d’animaux introduits comme rats, cochons et chats, a rapidement mené à l’extinction de l’espèce au XVIIe siècle.
Les kiwis, endémiques de Nouvelle-Zélande, rejoignent cette liste d’oiseaux qui ont perdu leur capacité de vol grâce à leur environnement sans prédateurs. En tant qu’animaux nocturnes, leur évolution a naturellement favorisé cette adaptation, leur permettant de se concentrer sur d’autres stratégies pour survivre.
Une autre espèce, la sarcelle de Campbell, également originaire de Nouvelle-Zélande, n’a pas volé depuis longtemps. Bien qu’elle ait été menacée par des prédateurs introduits, notamment les rats, elle a été sauvée grâce à des programmes de reproduction contrôlée et de réintroduction.
Enfin, le cormoran aptère des Galápagos, qui est la seule espèce de cormoran sur cet archipel, montre la même tendance. Plus lourd que ses congénères, cette espèce a, en raison de son isolement, perdu sa capacité à voler.
Une évolution stratégique
Certains oiseaux ont également abandonné le vol après une adaptation à leur mode de vie, favorisant d’autres compétences. Par exemple, les pingouins, qui possèdent des ailes mais très réduites par rapport à leur corps, ont exploité leur morphologie pour devenir d’excellents nageurs. Leur corps s’est façonné pour favoriser la glisse dans l’eau, leur permettant de plonger profondément et d’attraper poissons ou crustacés, leur principale nourriture.
De leur côté, les autruches et émeus, parmi les plus grands oiseaux terrestres, ont vu leur capacité à voler disparaître en raison d’une augmentation de leur masse corporelle et de leur taille. Cela a rendu leurs ailes inutilisables pour le déplacement, mais leur musculature des pattes leur confère une grande vitesse pour courir sur de longues distances. Cette adaptation leur permet d’échapper à leurs prédateurs et d’explorer de vastes terrains à la recherche de nourriture.
Le kakapo, un cacatoès terrestre de Nouvelle-Guinée, témoigne également de cette évolution. Son incapacité à voler ne l’empêche pas de survivre, grâce à son plumage cryptique qui le dissimule efficacement dans son habitat pour éviter les prédateurs.
Atrophie musculaire
Les modifications prolongées résultant de l’évolution peuvent, à terme, conduire à une atrophie musculaire, rendant certains oiseaux incapables de voler. Cette faiblesse musculaire peut apparaître lorsqu’un oiseau subit un manque d’exercice ou se trouve dans un espace restreint, notamment dans des élevages intensifs. Ces conditions, souvent considérées comme étant proches de la maltraitance, limitent le mouvement et contribuent à la perte progressive de la capacité de vol.
La sélection génétique pratiquée par l’humain pour simplifier la gestion et la reproduction des oiseaux domestiques agit aussi sur cette capacité. Par exemple, chez les poulets, des choix visant à accélérer leur croissance, à augmenter leur production d’œufs ou à atteindre une taille imposante ont favorisé une atrophie des ailes, qui ne sont plus adaptées à voler aujourd’hui.
De même, certaines races de poules pondeuses ont été sélectionnées délibérément pour avoir de courtes ailes, empêchant ainsi tout risque d’évasion ou facilitant leur gestion en captivité.
Les blessures, maladies et autres causes
Pour compléter ce panorama, il faut également considérer les blessures ou maladies pouvant entraîner la perte de capacité à voler. Certains propriétaires coupent volontairement une partie des ailes pour éviter que leurs oiseaux ne s’échappent. Une fracture ou une luxation, souvent dues à une chute ou à une attaque d’un prédateur, peut également rendre un oiseau incapable de voler si elle n’est pas soignée à temps.
Les plumes sont essentielles pour assurer le vol. Lorsqu’elles sont cassées, arrachées ou mal entretenues, cela limite la capacité de l’oiseau à s’envoler à nouveau. Par ailleurs, la présence de parasites comme les acariens ou les poux peut endommager la plumaison, réduisant la capacité de vol.
Les infections bactériennes, virales ou fongiques, telles que la grippe aviaire, la maladie de Marek ou la psittacose, fragilisent la santé, provoquant fatigue, perte de poids ou faiblesse musculaire, conditions qui impactent directement la faculté de voler.
Une alimentation inadéquate, notamment un déficit en vitamines et nutriments essentiels, peut également provoquer des atrophies ou weaken la musculature, contribuant à l’impossibilité de s’envoler.
Si, dans la nature, la capacité de voler constitue une stratégie de survie contre les prédateurs, cette nécessité peut disparaître lorsque ceux-ci ont disparu. Certaines espèces ont alors évolué pour privilégier d’autres moyens de protection, comme le camouflage ou la nage. L’intervention humaine, à travers la négligence ou la maltraitance, peut aussi conduire à la perte de cette faculté, tout comme les accidents ou maladies endommageant la structure de l’aile ou altérant la santé des plumes.