Les secrets du charmeur de serpents : comment cela est-il réalisé ?

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Lorsque l’on évoque la figure du charmeur de serpents, l’image qui revient souvent est celle d’un homme empaqueté dans un turban, jouant d’un instrument à vent tout en faisant évoluer un reptile dangereux en le faisant onduler au rythme de sa musique. Cependant, derrière ce cliché, se cache une réalité bien différente. Quelles sont réellement les interactions entre l’humain et le serpent ? Comment se produit cette illusion de danse au son des mélodies ? Vous allez découvrir tous les détails !

De quelle manière le charmeur attire-t-il un serpent ?

Les professionnels du spectacle utilisent principalement des instruments comme le pungi, une sorte de clarinette rudimentaire avec un ou deux bourdons, qui produit un souffle continu. Parfois, ils accompagnent la musique de percussions ou d’un second pungi. Cependant, cette musique ne vise pas à apaiser ou à charmer le serpent, mais plutôt à divertir le public, notamment touristique. En réalité, ces reptiles ne réagissent pas à la musique comme on pourrait le penser, puisque leur ouïe externe est absente ou très limitée. Leur perception sonore repose surtout sur le ressenti des vibrations dans le sol, grâce à leur oreille interne reliée à la mandibule par une petite structure qu’on appelle la columelle. Lorsqu’un serpent se déplace, il capte ces vibrations, ce qui explique que des cailloux jetés devant eux lors de marches en zone habitée peuvent les faire fuir, réduisant ainsi le risque de morsures.

Alors, le véritable rapport entre l’homme et la créature ? Le serpent aurait-il la capacité d’être hypnotisé ? Le cobra indien, également appelé cobra à lunettes, est la star de ces spectacles, mesurant la plupart du temps entre 1,4 et 1,6 mètres. Ce qui est exploité chez lui, c’est sa réaction de défense : face à une menace, il se dresse en utilisant la souplesse de sa peau pour faire grossir son cou. En sifflant, il cherche à impressionner l’adversaire, avant de projeter sa tête pour mordre. Le charmeur joue avec la distance en agitant son instrument pour empêcher le serpent de se lancer à l’attaque, tout en maintenant une tension qui maintient l’illusion de contrôle.

Les origines de la pratique et leur signification

On considère généralement que cette tradition trouve ses racines en Inde. Dans l’histoire ancienne, à travers le sanskrit, le serpent se nomme “naga” et apparaît dans la mythologie hindoue comme un gardien de trésors. Les nagas symbolisent la prospérité, la fertilité et incarnent aussi une énergie spirituelle pouvant conduire à l’éveil. Parmi eux, le plus célèbre est Ananta, un gigantesque serpent sous lequel repose Vishnu, un dieu de la création.

Dans le contexte social traditionnel en Inde, existe une caste spécifique appelée sapera. Elle regroupe des individus, souvent transmis de père en fils depuis plus d’un siècle et demi, dont la mission initiale était de capturer des serpents errants ou de soigner ceux qui mordaient en administrant l’antidote. Avec le développement du tourisme, certains d’entre eux ont commencé à organiser des spectacles de “danse de serpents” pour assurer leur subsistance. Bien que la société les regarde avec une certaine méfiance, ils restent admirés dans la culture hindoue, notamment parce qu’ils sont liés à Shiva, le dieu à la peau bleue, souvent représenté avec un cobra autour du cou. En 2019, cette communauté comptait environ 800 000 personnes en Inde.

En dehors de l’Inde, Marrakech, au Maroc, est aussi célèbre pour ses charmeurs de serpents, notamment lors du marché de la place Jemaa-El-Fna. Ils y présentent aussi bien des cobras que des vipères heurtantes ou des couleuvres.

Quels impacts ces spectacles ont-ils sur les animaux ?

Il est important de démystifier le prétendu caractère noble ou magique de ces représentations. En réalité, le charmeur ne cherche pas à rendre l’animal docile, mais à épuiser ses réflexes de défense pour impressionner le public.

Les conséquences pour les serpents sont graves et multiples. Tout d’abord, ils sont souvent mutilés : leurs crochets venimeux sont enlevés ou leurs glandes à venin sont perforées ou cousues pour éviter toute morsure. Ces opérations, souvent réalisées sans précaution, provoquent souvent des infections ou des abcès conduisant à la mort de l’animal.

Ensuite, la pratique même de manipuler ces reptiles leur impose une exploitation excessive. Le maintien en position dressée, la confrontation répétée avec l’humain, l’enfermement prolongé, et le stress constant, réalisent un aperçu d’une maltraitance systématique. La vie de ces serpents, soumise à ces conditions, entraîne souvent leur décès prématuré en quelques mois seulement, leur bien-être étant totalement négligé.

La souffrance chez les serpents : un sujet encore en étude

Face à la popularité croissante des reptiles comme animaux de compagnie, la recherche vétérinaire s’est intéressée à leur perception de la douleur. Pendant longtemps, ils ont été considérés comme insensibles, notamment parce que leur système nerveux central semblait moins développé que celui des mammifères. Cependant, de nouvelles études montrent que leur comportement change en réaction à la douleur ou à la maladie, et qu’ils manifestent une certaine réactivité. Ce qui est perturbant, c’est que leur activité physiologique dépend fortement de leur environnement thermique, ce qui complique l’interprétation des réactions liées à la douleur. La présence d’effets secondaires lors de tests avec des médicaments analgésiques tend à démontrer qu’ils ressentent bel et bien la douleur.

Dans une société qui valorise de plus en plus le respect du bien-être animal, l’utilisation de serpents dans des spectacles de charme devient de plus en plus contestée. La pratique a été interdite en 1972 en Inde par la loi sur la protection de la faune, mais, pour diverses raisons sociales et économiques, elle a perduré. Depuis le début des années 2000, des sanctions plus strictes ont été mises en place, provoquant la colère de nombreux charmeurs, souvent dépendants de cette activité pour survivre. Ces populations continuent à réclamer leur droit de pratiquer leur métier, tout en faisant face à la pauvreté et à la pression de l’interdiction.