Selon une majorité de spécialistes en paléoanthropologie, l’évolution de l’humanité aurait été profondément influencée par la capacité à maîtriser le feu. Cette découverte a permis d’améliorer la cuisson des aliments, facilitant ainsi la mastication et la digestion, tout en permettant au cerveau humain de se développer davantage. Au-delà de ses bénéfices physiologiques, le feu a également servi de point de rassemblement social, créant des espaces où les groupes pouvaient se rassembler autour des flammes. La capacité à contrôler le feu constitue donc une étape essentielle dans l’évolution de l’Homo sapiens. Cependant, en dehors de cette maîtrise, plusieurs animaux peuvent tout de même être confrontés au feu lors d’incendies naturels ou accidentels. La question qui se pose est alors : comment réagissent-ils face à ces situations ?
Des écosystèmes où les incendies sont une composante régulière
Les incendies jouent un rôle majeur dans le renouvellement de nombreux habitats à travers la planète, participant à la préservation de la biodiversité.
Les savanes d’Afrique, d’Australie ou d’Amérique du Sud connaissent fréquemment des brûlages naturels qui permettent de maintenir l’équilibre entre prairies ouvertes et zones forestières. Ces feux éliminent les arbustes et jeunes arbres qui pourraient autrement envahir ces plaines.
Les populations autochtones d’Amérique du Nord, avant l’arrivée des Européens, utilisaient également des feux contrôlés pour façonner le paysage. Les prairies étaient adaptées à ces incendies fréquents, permettant de brûler les accumulations de débris végétaux, de fertiliser le sol avec les cendres et d’encourager la pousse de végétation nouvelle. Ce que certains considéraient comme une nature sauvage intacte était en réalité façonné par une gestion régulière des incendies.
En Australie, les forêts d’eucalyptus présentent une adaptation spécifique à un rythme d’incendie fréquent. Certaines espèces possèdent même des écorces qui se détachent pour diffuser le feu, favorisant leur régénération. Toutefois, ces stratégies optimales ne fonctionnent que dans des intervalles et intensités précis. Si les incendies deviennent trop nombreux ou violents, la capacité des eucalyptus à se rétablir peut être sérieusement compromise.
La réaction des animaux sauvages face au feu
Les différentes espèces animales réagissent de manière très variable face au feu. En général, la majorité d’entre elles considèrent le feu comme une menace immédiate et tendent à s’éloigner. Grâce à leur odorat ou à leur vision, plusieurs mammifères et oiseaux sont capables de percevoir un incendie à distance, leur permettant d’évacuer la zone avant que le feu n’atteigne leur environnement.
Certaines espèces, cependant, adoptent une attitude opportuniste en profitant du feu pour leur avantage. Par exemple, certains rapaces chassent des proies en se servant de la fuite d’animaux effrayés par l’incendie. De même, certains insectes sont attirés par les zones brûlées ou par la chaleur, car ces environnements offrent des conditions favorables à leur développement ou à la mise bas de leurs œufs.
La fumée : un challenge pour la faune
Bien que la majorité des animaux évitent le contact direct avec le feu, ils peuvent néanmoins inhaler la fumée produite par les incendies. La physiologie de certains animaux, comme les oiseaux, leur confère une respiration très efficace, leur permettant d’absorber rapidement l’oxygène. Cependant, cette même efficacité peut les rendre plus vulnérables aux toxines contenues dans la fumée.
Les cétacés, tels que les baleines et les dauphins, sont également très sensibles à la pollution atmosphérique lors des incendies, puisqu’ils échangent une grande partie de l’air dans leurs poumons à chaque respiration — jusqu’à 80 %, contre seulement 20 % chez l’humain. Par ailleurs, ils ne disposent pas de sinus ou de mucus pour filtrer les particules toxiques de l’air, ce qui augmente leur vulnérabilité.
Adaptations comportementales face au feu
Au-delà de la simple fuite, beaucoup d’animaux modifient leur comportement pour survivre à des incendies. Après un feu, certains petits marsupiaux et chauves-souris ralentissent leur métabolisme afin de réduire leurs besoins en nourriture en période de pénurie. La présence de fumée induit aussi du stress, ce qui peut perturber leur cycle de reproduction : mâles et femelles peuvent cesser leur production de sperme ou leur période de chaleurs, et leur système immunitaire s’affaiblit, rendant leur récupération plus difficile en cas de blessure.
Certaines espèces de fourmis, ayant développé des nids souterrains résistants à la chaleur et à la fumée, profitent de l’incendie pour coloniser rapidement la surface et exploiter les ressources libérées. Des reptiles et serpents se réfugient quant à eux dans des crevasses ou des terriers, ralentissant leur métabolisme pour résister à un oxygène réduit durant une période donnée.
Les koalas face aux incendies en Australie
Les incendies de forêt en Australie ont suscité une couverture mondiale, en particulier en raison de leur impact dramatique sur la faune locale, dont le célèbre koala. Comparés à d’autres animaux qui peuvent fuir ou s’adapter rapidement, ces mammifères arboricoles sont particulièrement vulnérables pour plusieurs raisons.
Grâce à leur morphologie, ils passent la majorité de leur vie perchés dans les branches des eucalyptus. Leur capacité à se déplacer au sol est très limitée, ce qui entrave leur fuite rapide face à l’avancée des flammes. Leur alimentation repose presque exclusivement sur les feuilles d’eucalyptus, ce qui signifie que la destruction de ces arbres les prive à la fois de nourriture et d’abri. De plus, leur faiblesse physique accroît leur risque de se faire attraper par des prédateurs lors des incendies.
Des actions de conservation sont en cours pour leur venir en aide, notamment la création de corridors écologiques afin de leur offrir des voies de déplacement, ainsi que des programmes sanitaires pour réhydrater et soigner les koalas blessés ou affaiblis. La restauration de leur habitat constitue également une priorité pour réduire l’impact des futurs incendies.
Malgré leur capacité à échapper aux flammes initiales, la menace à long terme que représentent ces feux, aggravés par le changement climatique, est considérable. La destruction des habitats, la diminution des ressources alimentaires, et l’augmentation du risque de prédation compliquent la survie de ces animaux face à une menace toujours croissante.