Les humains ne ressentent pas tous le froid de la même manière. Certains supportent mieux les températures basses, ce qui peut se compenser par l’ajout de couches vestimentaires ou l’utilisation de dispositifs de chauffage. Cependant, pour la faune sauvage, ces options ne sont pas accessibles. Animaux ont dû inventer des méthodes naturelles pour résister aux climats glacials. Quelles sont-elles précisément ?
1 – Développer une toison ou des plumes épaisses
De nombreux mammifères se protègent du froid en disposant d’un pelage plus long et plus fourni. À l’approche de l’hiver, leur fourrure s’épaissit et s’allonge pour isoler efficacement la peau, emprisonnant de l’air chaud tout en limitant l’humidité grâce à une densité qui retarde l’infiltration de l’eau. Leur coloration s’adapte également aux changements saisonniers pour améliorer leur camouflage dans l’environnement enneigé ou givré.
Par exemple, le renard polaire (Vulpes lagopus) illustre parfaitement cette adaptation. Plus petit que ses congénères comme le renard roux, il ne pèse qu’environ 5 kg et présente des oreilles et un museau plus courts. Capable de chasser dans des conditions glaciales jusqu’à -30°C, il possède deux couches de fourrure distinctes selon la saison. Sa fourrure hivernale, très épaisse, limite la déperdition thermique et sa teinte blanche lui permet de se dissimuler dans la neige. Les chasseurs ont rapidement compris l’intérêt de cette fourrure, l’utilisant pour confectionner des manteaux capables de supporter des températures extrêmes jusqu’à -45°C.
L’océanographe empereur (Aptenodytes forsteri) est un oiseau qui, lors des nuits polaires, supporte des températures pouvant descendre à -40°C. Son atout est une densité de plumes exceptionnelle : 15 par centimètre carré de peau. Ces plumes, courtes et rigides, ressemblent davantage à des écailles qu’à des plumes typiques, et sont agencées de façon à créer une barrière contre le vent et l’eau.
L’ours polaire (Ursus maritimus) possède quant à lui une double couche de poils : des sous-poils denses et des poils de couverture rigides d’une longueur allant jusqu’à 15 cm. Toute la surface de son corps, à l’exception de la truffe et des coussinets, est recouverte de cette toison protectrice.
2 – Accumuler de la graisse corporelle
En plus d’un pelage épais, ces animaux augmentent leur réserve de graisse pour mieux lutter contre le froid. Le renard polaire, par exemple, voit sa masse augmenter en hiver, doublant sa masse estivale. Ce corps gras sert à isoler thermiquement ainsi qu’à stocker de l’énergie pour faire face à une période de disette.
Le manchot empereur possède également une couche adipeuse de 2 à 3 cm sous la peau, qui lui confère une isolation supplémentaire face aux températures nocturnes glaciales.
Chez certains phoques, la couche de graisse peut atteindre jusqu’à 8 cm d’épaisseur, notamment chez les adultes, surtout ceux qui ont peu ou pas de poils. La gestion métabolique de leur graisse, notamment celle des phoques, est remarquable. Leur alimentation riche en protéines et en matières grasses leur permet de constituer jusqu’à la moitié de leur masse corporelle en graisse, grâce à une mutation génétique spécifique (gène APOB) qui leur permet de supporte cette accumulation sans développer de maladies cardiovasculaires.
Chez la baleine bleue (Balaenoptera musculus), des couches de graisse atteignant 15 à 20 cm d’épaisseur (certaines espèces jusqu’à 30 cm) jouent un rôle crucial pour l’isolation et la flottabilité. Leur composition en majorité d’huile permet de rendre cette masse moins dense que l’eau, ce qui facilite leur déplacement dans les eaux froides de l’Arctique ou de l’Antarctique.
3 – Modifier la circulation sanguine
Certains animaux contrôlent le flux sanguin pour conserver leur chaleur. Chez le manchot empereur, la circulation sanguine est organisée pour transférer la chaleur entre les artères et les veines, notamment dans les pattes, ce qui maintient ces extrémités à une température supérieure à celle de l’environnement, évitant ainsi la congélation.
Les poissons, tels que la morue polaire (Boreogadus saida), ont développé des protéines antigel dans leur sang. Ces molécules d’acides aminés empêchent la formation de cristaux de glace, permettant à leur sang de rester fluide malgré des eaux proches ou inférieures à zéro degré. Des animaux comme la chenille de la verge d’or stockent également du glycérol, un alcool qui leur permet de résister à des températures pouvant descendre jusqu’à -35°C.
4 – Vivre en communauté
Le regroupement est une stratégie essentielle pour certains animaux. Le manchot empereur, par exemple, forme de vastes colonies où, lorsque les femelles partent chercher de la nourriture, les mâles incubent les œufs en se serrant étroitement. En se plaçant dans des positions où ils se relaient pour garder leur chaleur, ils peuvent atteindre une température centrale de +34°C alors qu’il fait -35°C dehors. Leur densité de population permet une meilleure conservation de la chaleur, même dans un environnement très froid.
5 – Capoter la chaleur
Chez l’ours polaire, le poil translucide et creux de sa couche extérieure permet de capter la chaleur solaire pour la transmettre à la peau, qui est noire afin d’absorber un maximum de rayons. Cela optimise l’utilisation de l’énergie solaire comme un isolant thermique.
Le phoque de Sibérie (Pusa sibirica) vit dans des eaux glaciales autour du lac Baïkal, en Russie. Même très peu chaude en été, la présence d’une couche de graisse épaisse et d’une fourrure fine et dense, presque noire lorsqu’elle est mouillée, lui permet de capter efficacement la chaleur du soleil pour limiter sa perte thermique. En hiver, ce phoque préfère rester dans l’eau froide plutôt que de s’exposer à la surface glacée, plus froide.
6 – Réduire les surfaces exposées au froid
Pour minimiser la perte de chaleur, certains animaux adoptent des postures de protection. Le renard polaire, par exemple, se recroqueville pour placer ses pattes et sa tête à l’abri, derrière sa queue touffue, afin de limiter la surface exposée. Bien que ne hibernant pas, il réduit ses sorties quand la température descend très bas.
Chez l’ours polaire, la gestation se déroule dans une tanière souterraine. La femelle, après avoir accouché, se réfugie dans une cavité creusée dans la neige ou la glace, utilisant la chaleur de son corps pour protéger ses petits jusqu’à ce que les conditions soient plus clémentes. Elle peut également s’abriter dans une ancienne tanière ou creuser dans la glace ou la terre gelée pour rester au chaud.
Ce panorama met en lumière la diversité impressionnante des mécanismes naturels mis en œuvre par les animaux pour survivre dans des environnements extrêmes. Même si toutes les stratégies ne sont pas évoquées ici, celles que nous avons explorées illustrent la capacité d’adaptation remarquable de la vie sauvage face au froid mordant.