Les expressions évoquant des animaux, telles que “rire comme une baleine”, reposent souvent sur une caractéristique marquante de l’animal en question. La baleine, qui navigue dans de vastes étendues marines, fait-elle vraiment preuve d’un rire communicatif ? Si tel est le cas, comment cette capacité pourrait-elle se manifester ? Est-ce qu’un animal “joyeux” aurait pu être à l’origine de cette formule ? Après avoir exploré les racines de cette expression, il se pourrait que sa vraie origine soit à rechercher dans un tout autre domaine…
Que veut dire l’expression “rire comme une baleine” ?
Lorsque l’on parle de “rire comme une baleine” ou “se tordre comme une baleine”, on décrit un rire éclatant, avec la bouche grande ouverte et de manière sonore. Ces tournures évoquent une personne qui rit à gorge déployée, en se contorsionnant, souvent en pleine jubilation. La première apparition connue de cette expression remonte au XIXe siècle, sans que l’origine précise n’ait été définitivement établie. Certains pensent qu’elle pourrait s’inspirer des premiers récits de pêche baleinière, comme dans le classique Moby Dick. Cependant, deux explications principales semblent l’éclairer : la première concerne directement les caractéristiques de la baleine en soi.
Pourquoi dit-on “rire comme une baleine” ?
La comparaison avec cet animal marin s’appuie sur ses attributs physiques et ses comportements caractéristiques :
- Sa large gueule. L’expression renvoie à la mâchoire imposante du plus grand mammifère sur notre planète. Quand une personne rit à pleine gorge, elle déploie sa bouche d’une façon qui rappelle la découverte de la dentition ou des fanons de la baleine lors de sa nourriture. En ouvrant si largement sa bouche, la baleine révèle ses dents ou ses fanons, ainsi qu’une langue pouvant dépasser deux tonnes. Sa grosse gueule lui permet d’aspirer jusqu’à 90 tonnes d’eau et d’aliments d’un seul coup !
- Ses émissions sonores. Un rire que l’on qualifierait de “baleinesque” doit être fort et retentissant. Étant donné la taille colossale de ces animaux—pouvant atteindre 30 mètres et peser jusqu’à 170 tonnes—il est imaginable que leurs sons soient aussi puissants que leur apparence l’indique, et perceptibles à plusieurs kilomètres. La baleine utilise ses sons, notamment pour communiquer et s’orienter dans l’obscurité des grandes profondeurs. Certains, comme les odontocètes (baleines à dents), produisent des séries rapides de clics et sifflements très aigus, tandis que d’autres (les mysticètes) chantent à basse fréquence, dans de longs répertoires appelés “chansons de baleines”.
- Ses mouvements acrobatiques. L’expression “se tordre comme une baleine” pourrait aussi évoquer ses contorsions spectaculaires. Lors de la saison de reproduction, les mâles réalisent souvent des parades nuptiales où ils frappent bruyamment la surface de l’eau avec leur queue, se roulent sur eux-mêmes ou sautent hors de l’eau pour retomber lourdement, provoquant de puissantes éclaboussures. Ces comportements de mise en scène sont autant de démonstrations de force et de vitalité.
Une baleine peut-elle réellement rire ?
Chez certains cétacés comme le dauphin, on observe des comportements qui pourraient passer pour des “sourires” continus, même dans des situations inconfortables. Mais en ce qui concerne la baleine, il est difficile de savoir si elle possède la capacité de rire. Jusqu’à présent, aucune preuve scientifique ne confirme cette aptitude. La diversité des baleines—bleues, à bosse, rorquals—est fascinante, mais leur expression de joie ou de plaisir ne peut pas encore être attestée. La seule “baleine rieuse” connue serait celle que l’on retrouve dans l’imaginaire des enfants sous forme de peluche, symbolisant la joie et la bonne humeur.
Rire comme une baleine… de parapluie ?
Une autre origine possible de cette expression repose sur une analogie avec le parapluie, qui s’est généralisé à partir du XVIIIe siècle. Le terme “baleine” désigne en effet le cadre de soutien en forme d’arche en métal ou en plastique qui maintient la toile du parapluie. Lorsqu’un parapluie s’ouvre, ses “baleines” se déploient, dessinant une courbe qui peut rappeler un sourire. Historiquement, les baleines étaient aussi des matériaux précieux à l’époque des campagnes de pêche : extraits du cuir de la mâchoire, leurs fanons étaient mâchés ou utilisés pour fabriquer divers objets, notamment des armatures. Certains fanons pouvaient atteindre un mètre de longueur dans les grandes espèces. L’idée serait que l’ouverture du parapluie évoque la torsion et la courbure d’une baleine souriante, mais l’origine exacte de cette expression demeure aujourd’hui encore mystérieuse. Deux perspectives cohabitent donc : l’une liée à la physiologie du cétacé, l’autre à l’image du parapluie, laissant chacun libre d’opter pour l’explication qui lui semble la plus plausible ou amusante.