Chez la faune, l’initiative de la reproduction s’accompagne-t-elle systématiquement d’une phase de mise en valeur sexuelle ? De nombreux oiseaux, comme le pigeon biset, la tourterelle des bois ou le merle, montrent des comportements de parade à cette occasion. Pendant la période de reproduction, plusieurs espèces de papillons exhibent également leurs ailes autour des femelles. L’affrontement du cerf lors du brame, qui reste un spectacle connu pour beaucoup, illustre aussi cette pratique. Cependant, peut-on supposer que cette mise en scène est universelle chez tous les animaux ? La réponse à cette question constitue l’objet de cet article.
Quel est le but de la mise en valeur lors de la reproduction ?
Le terme “parade” évoque, en langage courant, une démonstration ostentatoire visant à attirer l’attention. Quant à “nuptial”, il rappelle la notion de union matrimoniale ou d’engagement entre partenaires. En combinant ces deux mots, l’expression “parade nuptiale” peut donner l’impression que les animaux cherchent à simuler une forme d’union durable, à l’image de l’humain. Toutefois, cette expression peut aussi être remplacée par “ parade sexuelle”, plus neutre et plus précise, décrivant simplement une série de comportements de séduction précédant la rencontre sexuelle. De nombreuses espèces en pratiquent, mais cela ne concerne pas toutes, car certains animaux utilisent d’autres stratégies pour se reproduire efficacement.
Les limites et désavantages de la parade nuptiale
Les comportements de séduction comportent des risques pour la longévité des individus. En se faisant remarquer par des démonstrations ou en émettant des signaux spécifiques (sons, lumières) ou en offrant des présents, certains animaux attirent non seulement leurs partenaires potentiels, mais aussi des prédateurs. Par exemple, le plumage élaboré du paon lors de la parade en est une illustration claire.
Dans le cadre de la sélection naturelle, le biologiste Ronald Fisher, dès 1915, s’est penché sur la question de la préférence des femelles pour certains traits ornementaux. Il a avancé que ces traits étaient le signe d’une robustesse et d’une bonne santé, ce qui augmentait les chances que la descendance soit également forte. Ce processus permet au mâle de signaler sa vitalité et ainsi d’accroître ses chances de reproduction, ce qui favorise la survie de ses gènes.
Par la suite, dans ses travaux de 1930, intitulés The Genetical Theory of Natural Selection, Fisher a mis en évidence un phénomène d’emballement évolutif. Si, par exemple, une femelle privilégie les mâles aux plumes longues, celles-ci deviennent toujours plus longues avec chaque génération, amplifiant ainsi cette caractéristique. Cette boucle de rétroaction peut cependant conduire à une situation où les avantages initiaux deviennent nuisibles, en poussant les traits à extrêmes souvent délétères.
De plus, la compétition entre mâles pour attirer ou s’imposer face à leur rival est souvent féroce. Certains se battent à coups de poings, d’autres utilisent leurs cornes ou leurs bois pour s’affronter, parfois avec des conséquences graves : blessures, chute dans le vide ou mortalité. Ces affrontements peuvent entraîner la mort de l’un ou des deux combattants, ce qui illustre la violence inhérente à ces stratégies de sélection sexuelle.
Les animaux à reproduction par fécondation externe n’ont pas besoin de parade nuptiale
Malgré la difficulté de distinguer les sexes chez certains animaux marins comme l’oursin, ces organismes regroupent généralement mâles et femelles lors de la saison de reproduction. Tous deux libèrent séparément spermatozoïdes ou ovules dans l’eau, sans contact direct, ce qui permet la fécondation à l’extérieur du corps. De nombreux autres, tels que la méduse ou le saumon, adoptent également cette méthode, évitant ainsi l’étape de la parade nuptiale.
La parthénogenèse, une reproduction sans parade nuptiale
Déjà en 1740, le naturaliste Charles Bonnet remarquait que certains organismes, comme le puceron, pouvaient se reproduire sans fécondation. La parthénogenèse, terme dérivant du grec signifiant “création vierge”, désigne une forme de reproduction monoparentale où une femelle peut donner naissance à une progéniture sans l’intervention d’un mâle. Ce mode de reproduction, présent chez diverses espèces, tels que certains reptiles, poissons ou oiseaux, assure la survie de la population même en l’absence de partenaires, ce qui peut être crucial pour les espèces menacées ou isolées.
Ce procédé peut aussi coexister avec la reproduction sexuée, formant ce que l’on désigne comme une parthénogenèse facultative. En 2021, par exemple, deux poussins sont nés dans un zoo de Tendances et animaux sans intervention mâle, chez des condors, ce qui témoigne de la plasticité de ce phénomène. Des cas similaires ont été relevés chez des serpents marins ou des requins, où cette forme de reproduction devient une stratégie complémentaire.
Chez certaines autres espèces, la parthénogenèse constitue la seule voie de reproduction possible. C’est le cas chez l’Aspidoscelis neomexicana, un saurien parmi d’autres, qui ne compte que des femelles et se reproduit exclusivement par ce mode, qualifié de thélytoque.
La diversité de la nature est remarquable. Si l’on tend souvent à projeter nos comportements anthropomorphiques sur la faune, il faut comprendre que ce qui favorise la sélection chez une espèce n’est pas nécessairement valable pour une autre. Chacune, selon ses besoins et ses environnements, développe les stratégies d’ingéniosité les plus adaptées à sa survie, sans qu’une règle unique ne s’impose.