Présente sur notre planète bien avant celle des dinosaures, la limule fascine par son apparence ancestrale. Cet animal marin, dont le sang bleu possède des propriétés uniques, capte l’attention des chercheurs qui s’attardent sur ses particularités médicales.
La limule, un être proche des arachnides
Classée parmi les xiphosures et membre des limulidés, la limule est un arthropode qui ressemble à un crabe, tout en étant apparentée aux arachnides comme les scorpions ou les araignées. Quatre espèces encore vivantes subsistent dans ce groupe :
- Le limulus polyphemus, le plus répandu, souvent appelé crabe sabot de cheval ou crabe des moluques, évolue sur les côtes de l’Atlantique et dans le golfe du Mexique ;
- Le carcinoscorpius rotundicauda, connu sous le nom de limule mangrove, se trouve principalement en Indonésie ;
- Le tachypleus gigas, présent en Asie de l’Est, notamment au Japon ;
- Le tachypleus tridentatus, que l’on retrouve aux Philippines et en Asie du Sud-Est.
La limule, un vrai fossile vivant
Grâce à son allure et à son histoire millénaire, la limule est qualifiée de fossile vivant. Présente depuis plus de 400 millions d’années, cet arthropode a conservé des caractéristiques préhistoriques à travers les âges. Survivant aux périodes glaciaires et aux extinctions massives, elle figure parmi les 1 à 10 % des espèces ayant résisté jusqu’à aujourd’hui, en restant pratiquement inchangée.
Epines et aiguillon, caractéristiques de la limule
Les quatre espèces de limules se ressemblent beaucoup. Comme tous les arachnides, elles possèdent deux parties distinctes : à l’avant, le céphalothorax ou prosome, avec une tête large et arrondie, surmontée de deux petits yeux ; à l’arrière, l’abdomen ou opisthosome, bordé de six paires d’épines pointues, se termine par un aiguillon caudal. Les cinq paires de pattes situées autour de la bouche, dotées de pinces, permettent à la limule de saisir sa nourriture et de la broyer. Ses appendices aplatis servent aussi de branchies et de nageoires. De couleur grise, brune ou noirâtre, le corps peut atteindre 70 cm, queue comprise, pour un poids allant jusqu’à 5 kilogrammes.
Le sang bleu de la limule renferme du cuivre
Le sang de la limule contient une molécule respiratoire appelée hémocyanine, dont la particularité est de transporter l’oxygène grâce à la présence de cuivre. Contrairement à l’hémoglobine de nos vertébrés, qui renferme du fer, cette pigment bleu est unique. La majorité des laboratoires l’utilisent pour diagnostiquer la présence de bactéries et surtout d’endotoxines. Lorsqu’il entre en contact avec ces substances, le sang coagule rapidement, formant un caillot qui empêche la propagation de l’infection dans le corps. Cette capacité exceptionnelle est précieuse dans le secteur pharmaceutique, notamment pour vérifier l’absence de contaminants dans le matériel médical, les produits de dialyse, les implants ou autres injections. Une infection bactérienne grave peut entraîner des complications sévères, voire la mort.
La limule, une proie ou un cadavre pour l’animal
Les limules évoluent principalement dans les eaux peu profondes des océans, nichés sur des fonds sablonneux ou vaseux à des profondeurs comprises entre 10 et 40 mètres. De temps en temps, elles s’aventurent sur le rivage pour s’accoupler, pondant leurs œufs dans le sable. C’est une espèce nocturne, qui se nourrit de mollusques, crustacés, vers, petits poissons et charognes. Étant dépourvue de dents, elle broie sa nourriture à l’aide de ses bases de pattes antérieures adaptées à cet usage.
La ponte lors des nuits de pleine lune
L’accouplement est un phénomène où le mâle, s’accrochant à la femelle avec ses pinces, la secourt dans ses déplacements. Pour la ponte, la femelle sort de l’eau à un moment précis : lors d’une nuit de pleine lune, en pleine marée haute, au début de l’été. Elle creuse un trou sur la plage, dépose jusqu’à 80 000 œufs, puis les recouvre de sable. Après quoi, le couple retourne en mer, emporté par la marée. Après environ deux semaines d’incubation, les larves éclosent, déjà segmentées. Elles profitent ensuite de la marée suivante pour rejoindre l’océan, tout comme leurs parents. La maturité sexuelle est atteinte vers l’âge de 9 à 12 ans.
La diminution des populations de limules
Les quatre espèces encore existantes sont désormais classées comme menacées par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). La surexploitation de leur sang dans l’industrie pharmaceutique a fortement contribué à leur déclin. Aujourd’hui, leur reproduction en laboratoire a permis de réduire la pression sur les populations sauvages. Cependant, la pêche commerciale reste la principale cause de mortalité, aggravée par la perte de leur habitat naturel, notamment à cause de la transformation des plages, des activités humaines et des changements climatiques provoquant la montée du niveau des mers. La limule peut vivre jusqu’à 30 ans.