Le chardon est une plante fréquemment rencontrée dans les zones tempérées du globe. Elle fait partie de la famille des Asteraceae et se décline en plusieurs espèces, notamment le chardon-Marie (Silybum marianum), le chardon des champs (Cirsium arvense) et le chardon penché (Carduus nutans). Facilement identifiable grâce à ses tiges épineuses et à ses fleurs de teintes pourpres, roses ou violettes, cette plante fleurit principalement à la fin du printemps et durant l’été.
Composés du chardon : bénéfices pour l’homme, risques pour les équidés
Le chardon pousse souvent dans les prairies, le long des chemins, sur les terrains en jachère ou dans d’autres espaces abandonnés. Dans les zones de pâturage ou en agriculture, il devient rapidement envahissant et peut coloniser rapidement une grande partie des terrains ouverts. Bien que son apparence semble modeste, cette plante présente un danger particulier pour les chevaux et poneys en cas d’ingestion, qu’elle soit volontaire ou accidentelle.
Ce végétal renferme un ensemble de composés bioactifs, dont la silymarine, qui est particulièrement concentrée dans le chardon-Marie. Ce dernier est reconnu pour ses vertus protectrices du foie chez l’humain. La silymarine est constituée de flavonolignanes, notamment la silibinine, la silidianine et la silicristine, qui possèdent des propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires. Utilisée en phytothérapie, cette substance aide à traiter les affections hépatiques et à défendre le foie contre divers toxiques.
Pourtant, ce qui est bénéfique pour l’homme peut s’avérer dangereux pour certains animaux. En particulier chez les équidés, la consommation de chardons peut comporter des risques. Certains notamment incluent des alcaloïdes pyrrolizidiniques dans leurs composés, susceptibles d’entraîner des lésions graves du foie en cas d’ingestion en quantité importante. De plus, les épines qui recouvrent la plante peuvent causer des blessures buccales, des ulcérations ou des lacerations dans la bouche, la gorge ou le système digestif des chevaux, provoquant douleur et inconfort.
Fibrose hépatique chez les chevaux
La fibrose hépatique constitue une maladie grave affectant le foie, qui se manifeste par la formation progressive de tissus cicatriciels remplaçant les cellules hépatique saines. Ce processus résulte généralement d’une inflammation chronique ou d’une lésion persistante du foie, pouvant être initié par l’ingestion de toxiques. Le foie étant central dans la gestion du métabolisme, la détoxification et la synthèse de protéines essentielles, cette affection compromet sérieusement la santé de l’animal.
Une ingestion régulière de plantes toxiques, telles que certains types de chardons, peut générer des lésions répétées du foie, qui tente alors de réparer ces dégâts en produisant du tissu cicatriciel. Avec le temps, cette fibrose peut évoluer vers une cirrhose, un état encore plus sévère où l’organe perd complètement ses fonctions. Les alcaloïdes pyrrolizidiniques contenus dans certaines variétés de chardons sont principalement responsables de ces dégâts, car ils se transforment en métabolites réactifs dans le foie, endommageant directement les cellules.
Les signes cliniques de cette maladie évolutive sont souvent discrets au début, ce qui complique un diagnostic précoce. Parmi les symptômes figurent :
- Perte d’appétit : l’animal manifeste une diminution de l’intérêt pour la nourriture, menant à un amaigrissement progressif dû à la perturbation du métabolisme hépatique ;
- Maigre et affaibli : la quantité de nutriments assimilés étant altérée, l’état général de l’équidé se dégrade, avec une perte de poids notable ;
- Asthénie :la diminution de la capacité hépatique à éliminer les toxines conduit à une fatigue accrue et à une baisse d’énergie visible ;
- Jaunisse : dans les cas avancés, la coloration jaunâtre des muqueuses et de la peau apparaît, résultat d’une accumulation de bilirubine ;
- Photosensibilisation : une réaction cutanée peut survenir lorsque le foie endommagé ne détoxifie plus certains phototoxines d’origine chlorophyllienne, telles que la phylloérythrine, qui s’accumulent sous la peau. Lorsqu’ils sont exposés au soleil, ces composés peuvent causer brûlures, ulcérations et douleurs, notamment sur des zones peu pigmentées comme le nez ou les oreilles ;
- Signes neurologiques : dans les stades avancés, l’accumulation de toxines comme l’ammoniac peut affecter le système nerveux, provoquant dépression, désorientation ou coma.
Le diagnostic s’appuie sur un examen clinique, des analyses sanguines, une échographie du foie ou une biopsie dans certains cas. Une fois la fibrose installée, il n’existe malheureusement pas de traitement curatif. La prise en charge consiste alors à atténuer les symptômes, à ralentir la progression de la maladie et à améliorer la qualité de vie de l’animal.
Adopter une alimentation faible en protéines et en lipides, tout en favorisant des glucides facilement digestibles, permet de soulager le foie. L’administration de suppléments antioxydants, comme la vitamine E, peut également soutenir la fonction hépatique. Lorsqu’une photosensibilisation se produit, il est essentiel de limiter l’exposition du cheval à la lumière du soleil en le maintenant dans l’obscurité ou sous abri, voire en utilisant des barriers ou crèmes protectrices.
Un suivi vétérinaire régulier est indispensable pour surveiller l’évolution de la maladie, ajuster les traitements et, si nécessaire, offrir des soins palliatifs pour soulager douleurs et inconfort dans les phases avancées.
Pourquoi les chevaux ne trient-ils pas leur nourriture eux-mêmes ?
Contrairement à d’autres animaux, les chevaux ont une capacité limitée à distinguer entre les plantes comestibles et celles qui sont toxiques. Leur aptitudes à éviter certaines végétations toxiques sont souvent liées à leur expérience et à leur apprentissage dans un environnement naturel, mais cette capacité s’amenuise en captivité.
En milieu sauvage, la pratique de pâturage leur permet, par l’apprentissage et la mémoire, de repérer certaines plantes à éviter. Cependant, quand ils sont domestiqués et confinés sur des pâturages contrôlés, ils ont peu d’opportunités pour apprendre à reconnaître les végétaux dangereux. Leur pâturage est souvent non sélectif, et en période de pénurie de nourriture, ils broutent plus longtemps et peuvent se tourner vers des végétaux peu appétents ou toxiques. Lorsqu’on coupe ou sèche la végétation, par exemple pour faire du foin, la visibilité des épines ou des tiges toxiques est parfois diminée, augmentant les risques d’ingestion accidentelle.
Actions de prévention pour les propriétaires de chevaux et de poneys
Le meilleur moyen de protéger les équidés consiste à adopter une gestion proactive des pâturages. Cela implique de régulièrement inspecter et éliminer les chardons ou autres plantes toxiques dès leur apparition. La suppression mécanique par fauchage ou arrachage doit être effectuée avec soin pour empêcher leur réapparition, notamment en s’assurant que les racines sont complètement éliminées pour éviter toute repousse. La mise en œuvre de mesures phytosanitaires, notamment l’utilisation d’herbicides spécifiques, peut aussi être envisagée sous réserve de respecter les précautions pour éviter tout impact sur la flore environnante et la santé des animaux.
Une gestion en rotation permet d’aérer les pâturages, favorise la repousse de végétaux nutritifs et limite l’envahissement par les mauvaises herbes. En période de déficit alimentaire, comme durant l’hiver ou lors de sécheresses, l’apport de fourrage supplémentaire, de qualité, est essentiel pour diminuer la tentation du cheval à picorer des plantes potentiellement toxiques.
En définitive, bien que certains composants du chardon puissent posséder des vertus pour l’homme, ils représentent un danger réel pour les chevaux. Une vigilance constante et une gestion soignée des pâturages constituent les clés pour protéger leur santé. En contrôlant la présence de ces plantes, en leur assurant une alimentation adaptée et en surveillant leur état de santé, les propriétaires peuvent réduire considérablement les risques et garantir le bien-être de leur troupeau à long terme.