Autrefois courant dans les exploitations agricoles, l’âne du Cotentin est une race emblématique reconnue en Normandie. Façonnée par son environnement, par le travail agricole et par l’élevage bovin, cette race s’est adaptée aux besoins locaux. Si, à l’origine, il servait principalement à transporter du lait, il est aujourd’hui davantage associé au secteur touristique. Voici une présentation de cette espèce singulière.
L’âne du Cotentin, un produit de la Normandie
Originaire de la péninsule éponyme dans le département de la Manche, dans le sud-ouest de la région, cet équidé tire ses racines d’Afrique. Il aurait été introduit sur le sol normand dès le Moyen Âge, avec des premières mentions attestant de sa présence au XVIe siècle dans la partie nord-ouest de la France. Son utilité s’est accrue aux XVIIIe siècle, où il s’est montré indispensable pour de nombreux agriculteurs, maraîchers et éleveurs. Sa constitution robuste le rends particulièrement adapté à la traction, que ce soit pour transporter des charges, tirer des véhicules attelés ou participer aux travaux de labour. Parallèlement, le développement de l’élevage laitier, notamment avec les vaches normandes, a conduit à une forte utilisation de ces ânes dans le transport des laitons, surtout dans les années trente.
La sauvegarde de l’âne du Cotentin grâce à des passionnés
À l’instar d’autres équidés, l’apparition de la motorisation a marqué un tournant pour l’âne du Cotentin. La croissance de l’automobile, du chemin de fer et des machines agricoles a peu à peu remplacé l’animal. Leur consistance a alors drastiquement diminué dans la seconde moitié du XXe siècle, conduisant la race au bord de l’extinction. En réponse à cette menace, un groupe de passionnés s’est mobilisé pour préserver cet héritage régional. En 1995, une association dédiée à la réhabilitation de cette race a été créée, et en 1997, les Haras nationaux ont officiellement reconnu la race et enregistré son pedigree dans un stud-book.
Un corps harmonieux et équilibré
De taille moyenne, ce petit équidé mesure généralement entre 1,20 m et 1,35 m chez les mâles, et entre 1,15 m et 1,30 m chez les femelles, pour un poids oscillant entre 150 et 180 kg. Sa silhouette compacte, musclée, se différencie par un dos droit, un poitrail large et haut, ainsi qu’une croupe circulaire et légèrement inclinée. Ses membres sont robustes, confirmant sa stabilité, avec une posture assurée et des pieds bien formés. La tête, droite et bien attachée à un cou robuste à la crinière simple, affiche un regard vif accentué par des arcades marquées. Ses oreilles, de proportions modérées, sont bien ouvertes et expressives.
La robe gris tourterelle caractéristique
La teinte de l’âne du Cotentin est généralement un gris dit tourterelle, allant du gris cendré au gris aux teintes bleutées. Le pelage est souvent marqué par une croix noire, connue comme la Croix de Saint André, et parfois par des zébrures visibles sur les membres. La tête présente parfois des reflets de nuances rousses jusqu’à la moitié du museau, tandis que le contour des yeux, le ventre et l’intérieur des jambes sont plus clairs, proches d’un gris-blanc. La base et le pourtour des oreilles ont une teinte plus sombre, tout comme la queue. La couleur du nez peut aller du noir au gris foncé. La race ne tolère pas des couleurs comme le bai, le noir ou le blanc.
Un caractère doux et rassurant
Reconnu pour son tempérament paisible, cet âne est profondément affectueux et facile à dresser. Sa docilité en fait un compagnon idéal pour diverses activités, que ce soit pour marcher en longe, monter ou tirer en attelage. Très adaptable, il occupe une place privilégiée dans le tourisme vert, en promenant les visiteurs en calèche ou en accompagnant les randonneurs dans leurs balades. Son calme et sa gentillesse en font également un animal de compagnie précieux et un allié en thérapie auprès de personnes en situation de handicap. Par ailleurs, son lait, recueilli dans certains élevages, sert à la fabrication de produits cosmétiques naturels dont les bienfaits pour la peau sont grandement appréciés par les amateurs de produits biologiques.
L’âne du Cotentin, un patrimoine à préserver
Actuellement, c’est l’association de l’âne du Cotentin (autrefois appelée association de réhabilitation) qui assure la gestion du stud-book de la race. Elle œuvre aussi pour promouvoir sa reproduction et sa diffusion. Bien que visible dans plusieurs départements français, c’est surtout la Manche qui détient l’effectif le plus important. Depuis 2019, la région Normandie a inscrit cette race comme patrimoine régional menacé, en partenariat avec des associations locales, afin de sensibiliser le public. La race reste populaire dans les foires et concours locaux, et son espérance de vie peut atteindre entre 30 et 40 ans, faisant d’elle un véritable symbole de la région.
Crédit photo : Eponimm