La santé bucco-dentaire du lapin repose sur un équilibre délicat. Dans leur habitat naturel, ces animaux adoptent instinctivement des comportements qui favorisent l’entretien de leurs dents, notamment par la mastication constante de végétaux rugueux. En revanche, lorsqu’ils vivent en captivité, ils sont plus susceptibles de développer des troubles dentaires, ce qui responsabilise leur propriétaire dans le suivi et la prévention. Ces affections sont parmi les motifs les plus courants de consultation vétérinaire pour un lapin de compagnie. Voici les points essentiels pour veiller au bon état dentaire de votre compagnon.
La dentition du lapin : une particularité à connaître
Souvent confondu avec les rongeurs, le lapin appartient en réalité à la famille des lagomorphes, une distinction qui se reflète notamment dans leur structure dentaire. Contrairement aux rongeurs, ils ne possèdent pas de baculum, un os que l’on trouve dans le pénis de certains mammifères. Leur denture se distingue également par d’autres spécificités essentielles.
Le système dentaire du lapin est diphyodonte, ce qui signifie qu’il possède des dents temporaires qui tombent pour laisser place à des dents permanentes, assurant une croissance continue. Leur absence de canines, qui ne jouent pas de rôle chez les herbivores, est un autre trait caractéristique. Ils comptent 6 incisives, dont quatre placées en haut et deux en bas, présentes dès la naissance. Leur fonction principale est de couper la végétation. La seule paire visible en évidence est la paire centrale supérieure, entourée de petites incisives vestigiales, vestiges évolutifs sans fonction actuelle.
Les molaires et prémolaires apparaissent chez eux vers 3 ou 4 semaines, formant un groupe que certains spécialistes désignent par le terme « dents jugales ». Au total, leur dentition comprend 12 molaires en haut et 10 en bas. Ces dents sont séparées des incisives par un large espace appelé diastème, dû à l’absence de canines, un phénomène partagé avec des équidés destiné à faciliter l’utilisation du mors. Ces dents du fond, difficiles à voir, ont une forme triangulaire et participent activement à la mastication et au broyage des fibres végétales.
En résumé, un lapin possède 28 dents, toutes en croissance continue. Leur vitesse d’émergence varie selon leur position dans la bouche, avec une pousse estimée entre 2 et 2,4 mm par semaine, soit jusqu’à 12 cm par année.
Les principaux problèmes dentaires chez le lapin
Plusieurs facteurs peuvent entraîner des soucis bucco-dentaires chez cet animal :
- Un accident ou un choc pouvant provoquer des fractures dentaires ou au niveau de la mâchoire, souvent suite à une morsure intempestive sur des éléments rigides ou lors d’une chute,
- Une origine génétique pouvant causer un mauvais alignement des dents ou des mâchoires trop longues ou trop courtes, un souci fréquent chez certaines races comme les lapins nains ou bélier,
- Une alimentation déséquilibrée, pouvant entraîner une faiblesse dentaire ou une croissance anormale des dents, notamment avec une carence ou un excès en minéraux,
- Une exposition insuffisante aux rayons UVB, essentielle à la synthèse de vitamine D, dont le manque peut affecter la santé dentaire et osseuse. Il est conseillé de permettre aux lapins vaccinés de s’exposer à la lumière naturelle ou d’utiliser une lampe UVB adaptée.
Le trouble le plus fréquent chez le lapin est la « malocclusion dentaire », qui désigne un mauvais alignement ou un mauvais enroulement des dents. Si ce problème impacte souvent les incisives, il ne se limite pas à celles-ci. La croissance excessive des dents mal positionnées empêche leur usure naturelle, entraînant leur allongement démesuré.
Ce déséquilibre peut apparaître dès les premières semaines de vie, surtout en cas de facteurs génétiques. Il peut aussi se développer plus tard suite à une alimentation inadéquate ou à d’autres causes environnementales. Une détection précoce est essentielle pour intervenir rapidement et éviter des complications sérieuses.
Comment repérer un problème dentaire
Certains signes ne trompent pas et doivent inciter à consulter rapidement un vétérinaire, seul habilité à établir un diagnostic précis. Ces symptômes peuvent parfois évoquer un simple refroidissement, mais leur origine est souvent d’ordre buccal.
Voici les indicateurs à surveiller :
- Une perte d’appétit ou l’arrêt total de la nourriture,
- Une prise de poids inhabituelle, pouvant résulter d’une alimentation exclusive en granulés ou de la fatigue liée à une mastication inefficace,
- Des changements dans le comportement alimentaire, comme la préférence pour les aliments plus molles ou la troncature de certains morceaux de végétaux,
- Une mastication avec la bouche grande ouverte ou sans effort apparent,
- Le grincement ou le serrements des dents, une indication de douleur ou de stress,
- Une augmentation de la salivation,
- Une mauvaise odeur buccale persistante,
- Des modifications des selles, notamment une baisse de leur taille, une consistance molle ou une diarrhée, ou encore le refus de consommer certains caecotrophes,
- Des troubles respiratoires, comme des éternuements ou un écoulement nasale,
- Une inflammation oculaire, œil protubérant, larmoiement excessif ou conjonctivite, parfois associée à un problème au niveau du sac lacrymal.
Comment entretenir les dents de votre lapin
Une approche proche de son mode de vie sauvage est essentielle pour préserver sa santé dentaire. La mastication régulière de fibres végétales contribue à une usure naturelle optimale des dents. Le lapin pratique des mouvements complexes en forme de 8 lors de la mastication, ce qui est crucial pour maintenir leur longueur dans des limites normales.
Il est primordial de lui fournir en permanence du foin de qualité : vert, parfumé, sans poussière et séché au soleil pour préserver la vitamine D. La consommation quotidienne d’une quantité équivalente à son propre volume est recommandée, avec un renouvellement 2 à 3 fois par jour pour garder son attrait. Le foin favorise également un transit intestinal satisfaisant et une usure saine des dents.
Les légumes verts et les herbes fraîches doivent également faire partie de son alimentation. Cependant, il faut rester prudent avec les granulés : leur mode de mastication est plus vertical, car il ne s’agit pas de fragmenter des fibres, mais d’écraser une matière plus compacte. La salivation plus importante intervient rapidement, ce qui limite leur durée de mastication et peut réduire leur efficacité.
Enfin, une exposition régulière à la lumière du soleil est essentielle pour que le lapin synthétise la vitamine D, indispensable pour la fixation du calcium dans ses dents et ses os, assurant ainsi leur solidité et leur bonne croissance.